Corps artificiels et identités dans quelques romans de science-fiction pour la jeunesse

Corps artificiels et identités dans quelques romans de science-fiction pour la jeunesse

Par CLERMONT Philippe

La littérature de science-fiction (SF) produit en particulier des figures fictionnelles technologiques bien connues, voire parfois stéréotypées. Certaines de ces figures – le robot androïde, l’intelligence artificielle, le clone, le cyborg – sont à la fois des « objets de science-fiction 1 » et désormais des personnages à part entière de la fiction littéraire. Ce type de personnages renvoie à l’idée de « posthumanité 2 », c’est-à-dire l’hypothèse d’« êtres », les « posthumains », dont la variété des origines, en partie humaine ou totalement artificielle, et la proximité sapiente avec l’humain mettent l’accent sur leur caractère hybride, ainsi que sur la possibilité qu’ils auraient de remplacer l’humain, de venir après l’homo sapiens sapiens, comme fruit d’une évolution générée par le savoir technologique de l’Humanité. La SF contemporaine délaisse en partie le personnage de la « créature » qui échappe à son créateur (en référence, notamment, à celle de Victor Frankenstein), au profit d’un protagoniste fictionnel comme les autres, un « être », fut-il de métal, d’ingénierie génétique ou encore purement électronique. Ces figures de la « posthumanité » sont désormais très répandues en SF et constituent un topos artistique qui ne se limite d’ailleurs plus à la seule littérature ou au seul cinéma étiquetés « science-fiction », témoignant par là de la prégnance de cette figure en émergence dans la société réelle contemporaine 3. Dès lors, il n’est pas étonnant d’en constater des exemples dans la science-fiction adressée à un jeune lectorat, exemples qui méritent d’être étudiés pour ce qu’ils peuvent dire de la science-fiction pour la jeunesse, mais surtout pour l’usage que celle-ci fait du topos lui-même.

La présente contribution propose, dès lors, de se demander dans quelle mesure les corps artificiels des posthumains, puisqu’il s’agit bien au départ de corps modifiés ou bien de corps fabriqués, ont ou engendrent une identité particulière dans l’économie de l’histoire narrée. Par identité on entendra une caractérisation socialement et psychologiquement construite 4 qui, dans les récits considérés, pourra renvoyer à une identité d’âge, de sexe ou même parfois à une identité d’un nouveau type qu’on qualifiera plus loin d’« identité machinique ». Il s’agira notamment d’étudier la représentation corporelle de ces personnages a priori non humains (ou son absence) pour voir ce que celle-ci dit, à travers le voile de la fiction, des possibles de la construction d’une identité. Dans cette perspective, le corps et donc la voix, mais aussi les mouvements seront considérés comme révélateurs d’enjeux de pouvoir (droits individuels, rapports de domination) ou de réalisation pour le personnage (se connaître, être reconnu, devenir). Privilégier l’aspect de la construction identitaire des personnages posthumains nous paraît d’emblée légitime pour aborder un corpus de romans pour adolescents ou préadolescents, les représentations romanesques de l’adolescence passent en effet souvent par la question d’une identité en cours de construction.

Ainsi, au plan méthodologique, nous privilégierons la rencontre d’une approche sociologique du texte littéraire pour laquelle l’étude des représentations –  ici celle des identités – dit quelque chose de la société d’où sont issues les œuvres analysées (ainsi que de leurs auteur.e.s), et d’une approche littéraire plus « textuelle » qui s’intéresse notamment aux différents agencements de la langue et du discours en vue d’une visée esthétique et des valeurs portées par le récit. La rencontre de ces deux approches et leur intérêt heuristique, à propos de la question de l’identité dans des romans pour adolescents, repose en particulier sur ce que Jouve nomme « l’effet personnage » dans la fiction. Cet effet est créé chez le lecteur par la combinaison d’« extra-textuel » (qui renvoie à des données de compréhension issues de l’encyclopédie du lecteur) et l’« inter-textuel » (figures ou données issues d’autres textes ou d’autres références culturelles) 5. L’effet personnage peut être étendu sans difficulté particulière aux êtres artificiels de la science-fiction dont on peut poser qu’ils génèrent une identique activité projective chez le lecteur, comme celui-ci le fait avec des personnages pleinement humains. Cela se conçoit dans la mesure où ces personnages sont souvent les protagonistes principaux des récits retenus pour notre étude. Cela se conçoit également parce que la SF procède d’un fonctionnement « pseudoréaliste 6 », un peu à l’instar de la littérature réaliste, et que, précisément, la proximité ou bien l’hybridité du corps artificiel avec l’humain est bien l’un des enjeux des fictions considérées. Ainsi, il demeure « une relation non contingente entre personnage fictif et personne : le personnage représente fictivement une personne, en sorte que l’activité projective qui nous fait traiter le premier comme une personne est essentielle à la création et à la réception des récits 7 ». Ce processus, tant en création qu’en réception, nous autorise à considérer comme pertinente son extension aux personnages non humains de la SF et, partant, nous permet aussi de poser que les êtres semi- ou totalement artificiels de la science-fiction pour adolescents renvoient eux-mêmes souvent à une représentation de l’adolescence. C’est entre autres ce que la présente contribution tendra à montrer.

Le corpus retenu pour cette étude ne vise pas l’exhaustivité mais se veut un échantillon exemplaire de la production contemporaine sur cette thématique, en France. Un auteur traduit se mêlera aux écrivains français, tout d’abord pour témoigner – dans une proportionnalité toute relative – de cette présence d’auteurs étrangers dans les publications françaises pour la jeunesse qui vont, par la même, introduire le jeune lectorat à ce que l’on peut nommer « science-fiction ». D’autre part, ce titre traduit viendra, par son intérêt littéraire propre, renforcer les types de posthumains proposés par six auteurs français désormais bien connus (par le nombre d’ouvrages qu’ils et elles ont publié) et reconnus (par diverses distinctions littéraires reçues 8), et donc auteurs exemplaires en ce sens. Dans une esquisse de typologie technologique, le corpus en question permet de mettre en exergue quatre catégories de posthumains représentés : les clones (Grevet, 2014 ; Wung-Sung, 2013 ; Wung-Sung, 2015), les androïdes (Lambert, 2018 ; Simard, 2010), les personnalités électroniques (Debats, 2009 ; Heliot, 2005) et les humains augmentés (Lambert, 2018 ; Martinigol, 2013).

Pour analyser ces récits, il s’agira tout d’abord de mettre en relation la présence (parfois l’absence) corporelle de ces différents posthumains avec une première caractérisation identitaire, puis d’envisager ce qu’exprime la quête identitaire des personnages ainsi identifiés.

 

1. Corps, y es-tu ?

Le corps du personnage s’avère témoin dans l’économie de la fiction, il est porteur des traces du trajet narratif du personnage ou constitue parfois le vecteur de cette trajectoire. Pour le personnage, le corps est évidemment le lieu de perceptions, de sensations, avant d’être le moyen de l’action. Pour le lecteur, le corps est un indice, fournit des indices dans la quête de la compréhension du récit. Nous relèverons à la suite quelques uns des ces indices signifiants.

 

1.1. Corps parlant, subissant

Le corps est parlant dans les fictions considérées, non pas nécessairement au sens de la psychanalyse qui en fait le lieu d’expression de symptômes 9, mais dans le sens où il dit quelque chose du personnage ou bien que le personnage dit quelque chose de son corps. Ce « dit » du corps semble d’autant plus nécessaire que les personnages posthumains des récits du corpus sont peu décrits, sont peu l’objet de simples notations descriptives dans le cours de la narration, sauf exception.

Dans un premier temps, le corps reste le vecteur premier du contact du personnage avec l’environnement, comme pour tout humain. Cependant cette relation au monde s’opère dans des situations qui d’évidence introduisent un premier rapport à l’aventure (au plan narratif), mais aussi à la particularité des personnages posthumains du corpus (au plan de l’identité) :

 

Quand, dans un spasme, elle revint à la vie, elle ouvrit les yeux mais ne vit rien. Elle se trouvait dans le noir absolu. Elle toucha son visage et constata qu’elle portait des gants et un casque. Elle tâtonna autour d’elle et comprit qu’elle était enfermée dans un cylindre  10.

 

Pourtant, cette sensation de joie et de trop-plein était gâchée par un petit agacement : pour la première fois ni mon père ni ma mère ne se trouvaient dans les tribunes [...]. Je marchais sur le sentier qui longe la forêt et je sentais que mes sens étaient à l’affût comme jamais. Le parfum des fleurs sur la colline et l’odeur du shampoing dans mes cheveux me montaient aux narines. Le pépiement des oiseaux résonnait au creux de mes oreilles [...]. J’avais la vue aussi perçante qu’un aigle [...] 11

 

Ned H. Kowalsky se déplaçait de groupe en groupe, de sa démarche laborieuse, avec la sensation d’être un éléphant évoluant dans un magasin de nains de jardin en céramique. Il essayait de ne bousculer personne. Ses pas lourds laissaient des empreintes rectangulaires dans le gazon  12.

 

Qu’il s’agisse d’un cyborg (Martigol, 2013 ; Lambert, 2018) ou d’un clone (Wung-Sung, 2015), dès les premières lignes ou pages, ces romans mettent en scène un corps non décrit en interaction sensorielle avec le monde environnant et qui présente déjà une étrangeté. En effet, le lecteur, quelques pages plus loin, aura une confirmation : Charlex est effectivement revenue à la vie (ce n’était donc pas une image), après l’attaque subie par sa capsule spatiale ; l’une des difficultés de Ned Kowalsky est d’assumer sa condition d’humain dont les augmentations technologiques viennent compenser une maladie invalidante ; l’existence de Jonas va bientôt basculer dans un drame que ses « sens à l’affût » n’ont pas su annoncer, sinon par le pressentiment d’une situation potentiellement anormale.

Un deuxième temps des perceptions corporelles vient ensuite pour rendre compte de découvertes faites par les personnages et qui sont autant de chocs, petits ou grands, éprouvés et subis :

 

Soudain, elle réagit. Maudites sur-paupières ! Elle aurait du mal à les intégrer  13.

 

Oui, je crois qu’il était intéressé par ma petite bosse, celle qui est là  14.

 

Elle prenait simultanément conscience de son corps et de son environnement [...]. Le soir venu, elle observa son corps nu devant le miroir  15.

 

J’ai pris conscience que je ne regardais nul autre que moi-même [...]. Je sens une main, ce n’est pas la mienne. Pourtant mes doigts se referment  16.

 

Si Charlex éprouve des difficultés à contrôler ses diverses augmentations technologiques, Anatole 17 finira par comprendre que cette petite bosse à la base de la nuque est une spécificité qui désigne les clones tels que lui. Plus fondamental concernant la question de l’identité en construction, le corps est le creuset de l’éveil à la conscience de l’androïde Éva qui, telle une enfant humaine, passe par son stade du miroir. De même, Jonas après avoir vu, au début du récit, un double de lui-même, éprouve plus tard un trouble profond en faisant jouer une main qui est à la fois la sienne et autre, puisqu’il est en fait le clone de l’autre, humain véritable : c’est là la prise de conscience de sa différence après s’être regardé dans le miroir que constitue l’original dont il est la copie... Autant de découvertes de soi, sur soi subies par le personnage, en particulier à certains moments des histoires dans lesquelles celui-ci ne connaît pas encore sa « nature » (Grevet, 2014 ; Wung-Sung, 2015 ; Lambert, 2018) ou bien ne devrait jamais la découvrir s’il veut continuer à se croire humain (« Adam, murmura-t-il très bas, ne regarde jamais ta plante des pieds 18 ».

Ainsi, dans les différents moments des récits qui viennent ainsi d’être évoqués, tout passe par la mise en scène de la découverte progressive des particularités notamment physiques du posthumain, découverte souvent pour lui-même, mais évidemment aussi pour le lecteur ; les romans ménagent ainsi une forme de suspens ou des rebondissements de l’intrigue.

 

1.2. Corps en mouvement, agissant

Le corps des personnages bouge, évidemment, sans quoi l’action qui semble nécessaire à un roman pour adolescents ne serait pas.

 

Une partie de son esprit la regardait faire : gestes rapides, efficaces, mouvements précis des bras se croisant pour couvrir tout l’horizon. Plantée sur ses jambes raidies, elle était devenue une machine à tuer  19.

 

Je suis très maladroit, je risque de t’écrabouiller les pieds [...]. Éva tendit les bras vers son cavalier. Ned s’avança timidement, chaque pas lui donnait l’impression de soulever une tonne, alors que son cœur s’emballait de plus belle  20.

 

Nous courions. Le corps courait. C’était un automatisme. Un corps en train de courir. La totalité des membres, des veines et des os collaboraient pour que le corps détale. Il ne fallait au pied qu’une fraction de seconde pour s’adapter au sol  21.

 

Centimètre après centimètre, la brèche ouverte dans le mur était en train de se combler. Jérémy accéléra. Il n’aurait droit qu’à un seul essai, un seul saut, au terme de sa course  22.

 

Ces corps agissant expriment des états différents selon les personnages et selon le moment de l’action. Charlex, cyborg conçu pour des opérations de déstabilisation (une « guêpe »), possède un entrainement militaire pour sa défense : le corps est alors une « machine », parce que surentrainé, que contemple avec un certain détachement 23 sa propriétaire. Ned Kowalsky, jeune chercheur surdoué, s’essaye à la danse en exosquelette pour séduire l’androïde qu’il a créée : la maladresse du corps mécanisé signifie dans le même temps les hésitations pataudes d’un adolescent à ses premiers émois amoureux. Jonas et Ian vivent une odyssée de fuite devant les « libérateurs de copies » qui veulent détruire ces clones : « le corps courait » décrit à ce moment là non seulement l’automatisme du mouvement appris, des gestes coordonnés de la course, mais plus encore l’habitude de la fuite devant une menace mortelle récurrente ; le corps se détache alors peu à peu de l’esprit, s’épuise à fuir et cet épuisement annonce l’extinction inéluctable des copies. Alter Jérémy, en tant que personnalité électronique, évolue dans une simulation dans laquelle tous les actes de la vie peuvent être reproduits, il possède donc un corps virtuel dont il se sert au final pour fuir la simulation elle-même : quitter « physiquement » la simulation correspond à sa libération du joug des propriétaires du programme informatique.

 

1.3. Corps révélateurs

Sauf dans le cas d’une des deux personnalités électroniques du corpus, l’intelligence artificielle Draco (Debats, 2009) 24, le corps, bien que peu décrit dans les romans, n’est pas totalement aboli par la technologie, ce d’autant qu’il est un produit de la science. Copiant (Grevet, 2014 ; Wung-Sung, 2015 ; Lambert, 2018 ; Simard, 2010) l’humain pour les clones ou androïdes, le simulant pour les personnalités électroniques (Heliot, 2005), ou encore augmentant le corps humain (les cyborgs, Martinigol, 2013 ; Lambert, 2018), la technologie science-fictionnelle semble au contraire renforcer la nécessité d’une incarnation des personnages. Cependant, la faible présence de notations descriptives concernant le corps laisse apparaître des incarnations physiques somme toute abstraites ou bien met en exergue la dimension fabriquée du personnage, comme c’est le cas pour Ned :

 

Chacun de ses membres était recouvert de métal. Même chose pour le buste. On aurait dit un joueur de football américain croisé avec quelque créature sortie d’un film de science-fiction. Des articulations motorisées l’aidaient à plier les coudes ou les genoux, d’où ce ronronnement mécanique quand il se mouvait. Ses gestes étaient lents et aussi précautionneux que ceux des premiers robots humanoïdes  25.

 

Cette courte description met d’évidence l’accent sur le caractère hybride du personnage (« croisé avec »), plus monstrueux (« créature ») que super héros à la façon d’Iron Man. On voit ainsi, dans les indices relevés comme signifiants et qui viennent d’être présentés, que les corps évoqués agissent comme révélateurs. On l’a déjà compris : ils révèlent la construction d’une identité qu’il s’agit désormais de caractériser plus précisément.

 

2. Être artificiel, qui es-tu ?

L’identité personnelle que les personnages se forgent à travers leur corps et leur action constitue sans aucun doute un enjeu narratif important des romans de ce corpus. Celle-ci s’avère de fait composite ou à plusieurs facettes.

 

2.1. Des métamorphoses adolescentes

Topos, vraisemblablement, du roman pour adolescent, la représentation d’un moment de passage vers un état nouveau de plus grande maturité est l’une des lignes narratives des romans considérés. Cette transformation qui doit mener à l’âge adulte passe, le plus souvent, par une prise d’autonomie vis à vis des adultes ou référents du personnage, que cette autonomie soit désirée par celui-ci ou bien précipitée par les événements. Ainsi Ned (Lambert, 2018) va s’affranchir de ses parents dans son défi scientifique de créer une androïde parfaite au sens où elle ne serait pas distinguable d’une humaine ; Éva, cette même androïde, s’émancipera de son créateur ; les clones (Grevet, 2014), Anatole et Célia, quitteront le foyer familial in fine lorsqu’ils auront découvert toute la vérité au sujet de leur origine ; Charlex découvrant qu’elle est manipulée par ses employeurs et concepteurs parviendra à s’affranchir de son conditionnement (Martinigol, 2013) ; etc. La transgression est à l’ordre du jour, étape du parcours d’adolescents, notamment pour ceux qui s’aperçoivent que les parents peuvent mentir 26. Dès lors, à ces figures d’adolescents devenant plus murs correspondent celles de parents absents, démissionnaires ou déviants. Pour exemple de ces derniers, il s’agit de parents qui instrumentalisent les clones pour remplacer momentanément leur enfant malade (Wung-Sung, 2015) ou définitivement leur enfant délinquant (Grevet, 2014), construisant cependant une relation affective avec le double, celui-ci devenant un substitut de l’enfant souhaité (également dans Simard, 2010, pour l’androïde Adam). Les parents de Ned 27 ou le père de Jérémy 28 sont plutôt dépassés à l’égard de leurs enfants. Charlex, quant à elle, n’a pas de parents et les médecins ou instructeurs chargés de son développement et de son entrainement lui inspirent très tôt une certaine défiance 29. Un conflit de valeurs entre celles des adolescents posthumains et celles de leurs parents ou référents s’installe ainsi dans les récits, conflit qui conduit les personnages adolescents à prendre leurs propres décisions, c’est là un premier pas vers la constitution d’une identité propre.

Deux personnages du corpus sortent de ce cadre. Il s’agit d’Adam, le jeune androïde (Simard, 2010) qui, lui, n’apprendra jamais ce qu’il est et pense être l’unique enfant choyé du couple avec lequel il vit. Par ailleurs, l’intelligence artificielle Draco (Debats, 2009) assume une figure adulte par sa voix et son statut de mentor de la jeune Cléone à bord du vaisseau spatial de cette dernière. La personnalité électronique de Draco, perçue comme un dragon (!) par sa protégée, acquiert une vraisemblance à travers le portrait psychologique que Cléone en fait, la qualifiant de « vieille peste », « bourrée de contradictions », « ... mon IA, cinquante pour cent d’amour absolu, cinquante pour cent d’autocratisme forcené », à laquelle il suffit de répondre « oui et on fait ce qu’on veut ensuite 30 ! » A l’opposé des autres posthumains mis en récit, Draco est l’adulte de référence dont Cléone s’émancipe pour gagner l’autonomie complète de sa vie d’adulte et de capitaine d’un vaisseau indépendant.

 

2.2. Une « identité machinique » en émergence

L’expression « identité machinique » nous est suggérée par le roman de H. Harrison et M. Minsky, Le problème de Turing 31, dans lequel Sven, une I.A., récuse les termes d’« intelligence artificielle » à son propos, pour préférer « intelligence machinique ». Sven se constitue ainsi une identité propre valorisant davantage l’origine de son intelligence, « artificielle » étant péjoratif à son sens. Dans ce roman, cette décision, prise par la personnalité électronique lors d’un dialogue avec son concepteur humain, marque un moment clé de la prise de conscience de ce qu’elle est, ou plutôt veut être, la façon dont elle veut être considérée. Le processus est comparable pour les posthumains du corpus considéré et le parcours des personnages dans ce qui s’avère pour la plupart une quête d’eux-mêmes passe par des formes de conflit, de délibération qui vont les conduire à une prise de conscience forte. Pris entre humanité et machinisme, les jeunes posthumains acceptent – ou pas – leur hybridité, leur différence, leur « nature artificielle », l’origine de leur conception. Pour les clones, le conflit est douloureux et se condense dans l’opposition vrai/faux dès lors qu’ils découvrent qu’ils ne sont que des « remplaçants », les « vrais » étant ailleurs 32, voire qu’ils ne sont « rien », assimilables à des « choses » au regard des humains, au mieux de simples « copies 33 ». Pour cette catégorie-là de posthumains, l’identité s’avère impossible à accepter ou malheureuse, voire dramatiquement mortelle. Dans ces cas l’émancipation passera par la mort à l’issue d’une longue fuite (Wung-Sung, 2015) ou la fuite (Grevet, 2014). De façon comparable, Charlex prend conscience qu’elle n’est que du « matériel » aux yeux de ses concepteurs, statut dont elle s’affranchira tout en se sentant « plus cyber qu’humaine 34 ». Cette hybridité conflictuelle, exprimée par l’idée de « personna double », sera, à la fin du roman, vécue de façon plus équilibrée en faveur de l’aspect humain, lorsque Charlex fera le constat qu’elle peut tomber amoureuse 35 (Ibid. : 107, 265). L’opposition vrai/faux se retrouve pour la personnalité électronique Alter Jérémy : pour lui, se construire une identité passera pas l’acceptation qu’il n’est qu’une trace mémorielle d’un Jérémy humain, décédé accidentellement et qu’un programme informatique permet à sa famille de revoir. Combiné à cette figure d’opposition entre ce qui est vrai ou faux, se trouve le concept de substitut : plusieurs de ces posthumains ont été créés dans le but de remplacer l’humain, et c’est ce qui cause du trouble : les clones évidemment (Wung-Sung, 2015 ; Grevet, 2014), mais aussi les personnalités électroniques, Alter Jérémy, substitut du défunt Jérémy (Heliot, 2005) et Draco, substitut de parent pour Cléone (Debats, 2009), mais encore les androïdes Éva, substitut de femme parfaite adaptée au « monstre » que croit être Ned (Lambert, 2018) et Adam, substitut d’enfant pour un couple qui n’en a pas (Simard, 2010). Pour ces personnages, se constituer une identité propre les conduira à tenter de résoudre le conflit généré soit par l’hybridité (pour les cyborgs), soit par le fait d’être a priori un substitut (les autres types), et à décider de ce qu’ils veulent être ou comment ils veulent être considérés. La résolution de ce conflit mène à leur émancipation.

Le motif de l’émancipation se retrouve ainsi, non plus dans la simple dimension d’un adolescent en train de grandir, mais – de façon liée – dans un mouvement de libération (y compris parfois par la mort). L’image de l’esclave qui s’émancipe, se libère, émerge en même temps que le posthumain conquiert son autonomie de conscience (image implicite de la machine-esclave émancipée dans Lambert, 2018 ; Heliot, 2005 ; Martigol, 2013 et, dans une moindre mesure, Wung-Sung, 2015). Ce processus s’effectue dans un sens positif : loin de la créature qui échappe à son créateur pour causer le pire, cette émancipation s’avère donc à lire comme une révision de la figure de la créature de Frankenstein.

 

2.3. Des corps genrés, un processus identitaire sexué

Une troisième composante du processus identitaire est constituée par sa dimension genrée. La distribution des posthumains représentés s’avère clairement sexuée et plutôt hétéronormée. Deux jeunes femmes (Charlex, Éva), une figure féminine mûre (Draco) et cinq jeunes hommes composent l’échantillon donné à lire. Dans une sorte de politiquement correct étonnant, s’agissant de personnages non-humains ou hybrides, il n’y a pas de figure androgyne notamment. Les rapports fille-garçon se sexualisent avec la constitution de trois couples au cours de l’histoire (Éva-Ned, Lambert, 2018 ; Anatole-Célia, deux clones, Grevet, 2014 ; Charlex-Sesto, deux cyborgs, Martigol, 2013). Seul le hasard et les contingences de leur survie font se rapprocher les deux clones Jonas et Ian, sans aucune ambivalence dans leur relation d’entraide (Wung-Sung, 2015). Et le seul mélange d’« espèces » se réalise à travers le cyborg Ned et l’androïde Éva. Pour deux personnages, le genre féminin est particulièrement appuyé avec des notations descriptives remarquables au vu de la rareté générale de celles-ci, et met en avant – à nouveau – le corps dans le processus identitaire, le narrateur externe représentant dans les deux cas le point de vue de la société qui a produit le posthumain :

 

1) Charlex, quinze ans, 1,72 mètre, 60 kilos, brune aux yeux bleus. Sur les dossiers officiels, le petit x de son prénom désignait le chromosome féminin. Pendant longtemps, les Améliorés n’avaient été que des C.H.A.R.L.Ey (le y désignant le chromosome masculin) identiques au premier modèle testé sur Vulcain [...]. 

2) Le soleil avait bronzé ses longues jambes nues. Elle était impressionnante de force rentrée, prête à bondir comme un fauve, mais elle cachait sa puissance sous une silhouette élégante et déliée. Ses cheveux bruns avaient été disciplinés par une coupe structurée. Elle avait appris avec Fariziane à mettre en valeur son teint doré et ses yeux bleus magnifiques par un maquillage léger  36.

 

L’androïde féminin parfait, fruit de tant de labeur, gisait sur sa couchette en acier froid comme celui d’une morgue. Un maillot une pièce couvrait ses parties intimes. Elle était encore reliée aux ordinateurs par une série de fils gainés et semblait dormir, les bras étendus le long du corps. Ses cheveux bruns, mi- longs, avaient été ramenés en chignon derrière sa tête, formant une sorte de petit coussin  37.

 

Le lecteur ne trouvera pas l’équivalent de ces descriptions concernant les personnages masculins du corpus. Tout se passe comme s’il fallait le convaincre que Charlex 38 est bien tout d’abord unE adolescentE (en vue de ses futurs exploits physiques et militaires), avant de devenir une jeune femme « accomplie » (extrait 2), et qu’Éva est bien le résultat physique escompté par son créateur, l’incarnation d’un idéal féminin. La science-fiction pour la jeunesse n’échappe pas toujours aux stéréotypes. Pour autant, ces éléments genrés dans la narration viennent compléter le tableau des métamorphoses adolescentes déjà mentionnées. On peut ainsi observer une certaine proximité de fonctionnement de ces récits avec ceux centrés sur l’avènement de l’identité sexuelle des personnages dans d’autres romans pour adolescents, à l’esthétique réaliste cette fois 39.

Cependant, au final, on assiste avec ces personnages spécifiques que sont les posthumains à l’invention de corps et d’une identité d’un autre genre. En effet, le caractère hybride de la plupart des personnages ainsi imaginés est de nature, potentiellement, à dépasser le féminin et le masculin, même si cela ne semble pas explicite dans les récits considérés. Les êtres représentés ne sont pas vraiment humains, mais ils ne sont pas totalement « machiniques » parce que dotés d’une conscience, ayant le plus souvent une apparence très anthropomorphe et des comportements comparables à l’humain. Cet état tiers dans lequel ils se trouvent, d’origine scientifique ou technologique, en fait à la fois des objets mais aussi des sujets de science-fiction.

 

3. Pour conclure

3.1. Corps et identités

Au terme du parcours de lecture de ce corpus, le corps des posthumains (quand il y en a un, réel ou virtuel, ce qui est très souvent le cas) s’avère donc le révélateur d’une partie significative du processus d’individualisation et d’identité des personnages. Alors que ceux-ci étaient en situation d’être socialement ou physiquement dominés 40, la prise de conscience qu’ils ont pu opérer via leur corps notamment et les actions qu’ils ont pu entreprendre les ont conduits à une forme d’émancipation. Au cours de ce changement de statut, certains de ces personnages sont devenus des sujets de droit ou ont acquis des droits 41. Plus largement, la plupart est devenu un sujet autonome doté d’une conscience, un peu à la façon du « je pense donc je suis », cogito cartésien. Le posthumain mis en scène par la fiction a (ou résout) des états de conscience, comme on « a des états d’âmes », et donc il « est », c’est-à-dire qu’il a une identité. Ce point est d’ailleurs fortement corroboré par les occurrences du verbe « être » dans les fictions considérées, mises dans la bouche même des protagonistes. Au risque de figer ce qui ne peut l’être tout à fait (assumer/se constituer une identité est le résultat d’un processus potentiellement long ; l’hybridité des posthumains renvoie par ailleurs à une forme potentiellement instable), il est primordial pour les personnages, et donc dans la narration, de pouvoir affirmer ce qu’ils sont. Même si dans un premier temps cette affirmation d’« être » les réduit à l’étiquette de leur nature machinique ou à leur revendication d’humanité 42, le processus vécu les conduit à mieux se connaître, à voir comment ils sont perçus par les humains, afin de pouvoir devenir... et être acceptés en tant qu’êtres complexes. C’est là sans doute la dimension existentielle proposée par la trame narrative des romans, à l’exception de Les Copies où les clones restent sans avenir, car frappés par le déterminisme de leur courte vie dont les limites sont programmées génétiquement dans les cellules de leur corps.

 

3.2. Valeurs dans les récits et inscription dans une tradition

Au-delà du choix de chacun des types de posthumain, ces romans de science-fiction pour la jeunesse se rattachent doublement à la tradition de la SF pour « les plus grands ». En termes de valeurs présentes dans les récits, ceux-ci sont tout d’abord révélateurs de conflits éthiques en science, tels que la SF peut les mettre en scène en les fictionnalisant, voire les stéréotyper. Ainsi le personnage d’Alter Jérémy, substitut virtuel à l’être aimé mort, pose la question de la difficulté à faire un deuil lorsque la technologie permet d’entretenir le souvenir vivace du défunt, en le réincarnant en quelque sorte. Charlex, la cyborg, les clones (Wung-Sung, 2015 ; Grevet, 2014) et l’androïde Éva (Lambert, 2018) posent le problème de l’utilisation sans scrupule par les humains d’humanoïdes machiniques conscients et sensibles, alors qu’ils sont considérés comme du « matériel ». En termes de droit contemporain, il s’agirait de se demander si ce sont des choses ou s’ils peuvent se voir reconnaitre une personnalité juridique, au-delà même des animaux désormais considérés comme des êtres sensibles et sujets de droit. Draco (Debats, 2009), l’intelligence artificielle, illustre entre autres la question de l’éducation d’enfants confiée à un programme informatique complexe. Le personnage de Ned (Lambert, 2018) renvoie quant à lui au stéréotype du scientifique sans conscience, conduit au début de l’histoire par une hubris sciendi exacerbée. Ces questions de nature éthique sont générées par la création scientifique de ces posthumains et par les buts qui ont été assignés par les Humains à leurs créatures. Dès lors les valeurs portées par les romans qui mettent en jeu ces questions restent résolument dans le cadre d’une forme d’humanisme opposée à ce que le posthumanisme peut engendrer : en effet, l’effet personnage conduit le lecteur à rejeter le sort de matériel ou d’esclave implicite réservé aux posthumains et à les accepter du côté de l’Humanité.

L’autre inscription de ces histoires dans une tradition de SF relève du phénomène d’intertextualité. Avec le fonctionnement fréquent en littérature de jeunesse qui est celui du double destinataire 43, les romans jouent beaucoup avec des références relevant d’une SF classique, littéraire ou de cinéma, et souvent de façon explicite. Ce jeu intertextuel, particulièrement développé chez Christophe Lambert, a pour finalités tout autant d’installer une complicité de second degré avec des lecteurs adultes qui peuvent apprécier les références, que de mettre en place un réseau de filiation et de renvois aux classiques dont la visée peut être l’acculturation du jeune lecteur à une histoire du genre de la SF. Du côté des références implicites, Les Copies fait signe aux androïdes à durée de vie limitée du film Blade Runner, inspiré par Philip K. Dick, mais aussi à Des fleurs pour Algernon, roman de Daniel Keyes, par la reprise du procédé d’écriture mimant la régression des personnages : au fur à mesure de cette régression biologique progressive, la langue et la mémoire s’effacent, le texte s’appauvrit, se réduit, jusqu’à la fin. Des ados parfaits renvoie explicitement à Blade Runner que regarde Anatole. Charlex demande à un interlocuteur « penses-tu que je sois un personnage de science-fiction 44 ? », une question qui pointe à la fois une interrogation sur sa « nature » et instaure un second degré complice avec le lecteur (elle est bien un personnage de science-fiction !). Alter Jérémy (2005) précède, sur le même thème, un épisode de la saison 2 de la série « Black Mirror » (épisode 1, Be Right Back/Bientôt de retour, 2013), mais s’inscrit dans la lignée ancienne du motif du téléchargement de l’esprit permettant une forme de vie après la mort, motif dont Fredrick Pohl est un précurseur en SF avec son cycle de « La Grande Porte » (1977-1990). EdeN en sursis évoque le cycle d’Asimov, « Fondation », à travers l’onomastique des personnages : Cléone peut faire référence à l’empereur Cléon et Ari Sçeldon a également un peu à voir avec le Hari Seldon d’Asimov, inventeur de la « psychohistoire ». C’est dans L’Effet Pygmalion que Christophe Lambert semble beaucoup s’amuser en multipliant les références à l’envi : au-delà de la réactivation du mythe antique qu’indique le titre, c’est un florilège qui touche plusieurs genres artistiques avec Frankenstein, Asimov et ses trois lois de la robotique, le cycle « Harry Potter » (Ned Harry joue les apprentis sorciers), Robocop, L’Ève future, Batman, Vertigo et Pretty Woman. Le tout avec une distance humoristique comme pour le titre du chapitre 13, « Les androïdes rêvent-ils de vêtements synthétiques ? », détournement de celui du roman de Philip K. Dick, Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? Ce second degré assumé par l’auteur jusqu’à faire système dans le roman, met à distance le stéréotype romanesque issu des contes : la Bête, ici Ned, le monstre, homme contrefait car handicapé, sorte de ver de terre, tombe amoureux de la Belle qu’il a créée, ici l’Ève artificielle, image de perfection, sorte d’étoile. En effet, si une happy end permet de les réunir, la dernière ligne du roman dévoile tout l’aspect figé du stéréotype : « THE END (La caméra s’élève et générique de fin) », en un hommage, cependant, au cinéma. On voit par là, au-delà du cas particulier de L'Effet Pygmalion, combien cette littérature de jeunesse affectionne l’intertextualité en tant que procédé d’écriture.

 

3.3. Écriture actualisante

De la créature artificielle (celle de Frankenstein) à l’être machinique, une évolution du topos s’est opérée dont le corpus considéré prend acte. Cette évolution peut être à la fois le reflet des récits contemporains de science-fiction « pour les plus grands » et trace d’une évolution sociale en cours qui tendrait – notamment par un début de banalisation du robot androïde dans le monde réel 45 – à renouveler la perception des figures de posthumains. La façon de considérer ces personnages dans la fiction constitue, en tout cas, une manière de traduire les questionnements que leur introduction dans la vie réelle pourrait poser. Et si l’on imagine aujourd’hui pouvoir sérieusement disposer un jour de machines pensantes, c’est souvent après un détour par l’imitation du corps humain. En effet, il semble toujours plus facile à l’Humain de concevoir une conscience dans un corps anthropomorphe, un autre qui soit semblable, en fait.

 

  1. Simon Brean, Clément Pieyre, « Les chaines de l’avenir : la science-fiction une littérature à contraintes ? », Recto/Verso n°4, janvier 2009, http://www.revuerectoverso.com/spip.php?article143&var_recherche=br%C3%A9an.
  2. Voir Jean-Marie Besnier, Demain les posthumains : le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Hachette, coll. « Haute Tension », 2009.
  3. L’art contemporain s’est emparé du robot dans deux directions : les œuvres réalisées avec l’aide de robot (C. Partos et S. Takani, par ex.) ou bien celles prenant la figure du robot comme sujet (T. Deroche, par ex.).
  4. Voir Laurence Berenni et alii., Introduction aux gender studies – Manuel d’études sur le genre, Bruxelles, De Boeck Universités, 2008.
  5. Vincent Jouve, « Pour une analyse de l’effet personnage », Littérature, n° 85, 1992, p. 103-111, p. 109-110.
  6. Richard Saint Gelais, L’Empire du pseudo – Modernité de la science-fiction, Québec Montréal, Nota Bene, 1999, p. 168 et suivantes.
  7. Ostwald Ducrot, Jean-Marie Schaeffer, Nouveau dictionnaire encyclopédique des sciences du langage, Paris, Seuil, 1995, p. 623.
  8. Qu’ils soient multi primés (Debats, Grevet, Simard) ou simplement primés, tous les auteurs considérés ont ainsi vu un ou plusieurs titres de leur œuvre reconnus par la critique ou le public. Pour le Danois J. Wung-Sung, Les Copies a été distingué en France par le Prix Utopiales en 2016.
  9. Symptômes d’une discordance entre le sujet et son corps : « La psychanalyse prend en charge ce discord, ce dis-corps, ce dit sur le corps, cette discorde du corps et de l’être parlant qui habite ce corps comme mystère pour lui, comme réel. » (Bonnaud H., Le corps pris au mot, Paris, Navarin/Le Champ freudien, 2015, p. 21).
  10. Danielle Martinigol, C.H.A.R.L.E.x, Paris, Syros, « Soon », 2013, p. 7.
  11. Jesper Wung-Sung, Les Copies, Jean Baptiste Coursaud (trad.), Arles, Rouergue, « Épik », 2015 [2013], p. 9.
  12. Christophe Lambert, L’Effet Pygmalion, Montrouge, Bayard, 2018, p. 6.
  13. Danielle Martinigol, C.H.A.R.L.E.x, op. cit., p. 11.
  14. Yves Grevet, Des ados parfaits, Paris, Syros, « Mini Syros + », 2014, p. 39.
  15. Christophe Lambert, L’Effet Pygmalion, op. cit., p. 61, 88.
  16. Jesper Wung-Sung, Les Copies, op. cit., p. 16, 191.
  17. Yves Grevet, Des ados parfaits, op. cit., p. 40.
  18. Eric Simard, Robot mais pas trop, Paris, Syros, « Mini Syros Soon », 2010, p. 43.
  19. Danielle Martinigol, C.H.A.R.L.E.x, op. cit., p. 15.
  20. Christophe Lambert, L’Effet Pygmalion, op. cit., p. 112-113.
  21. Jesper Wung-Sung, Les Copies, op. cit., p. 112-113.
  22. Johan Heliot, Alter Jérémy, Paris, Mango, « Autres mondes », 2005, p. 62.
  23. Ce détachement peut être doublement interprété, dans l’économie du roman : comme annonciateur de la « schizophrénie » finale du personnage (Charlex perd un temps le contrôle d’elle-même au profit de la programmation de ses augmentations par leurs concepteurs, Martinigol, 2013 : 175), et comme volonté de mise à distance par l’auteur des éléments de violence du récit, ainsi que le montrent d’autres péripéties.
  24. Dans ce roman, l’intelligence artificielle Draco a sa voix synthétique pour seule manifestation physique.
  25. Christophe Lambert, L’Effet Pygmalion, op. cit., p. 6.
  26. Yves Grevet, Des ados parfaits, op. cit., p. 27, 62 ; Jesper Wung-Sung, Les Copies, op. cit., p. 20-21.
  27. Christophe Lambert, L’Effet Pygmalion, op. cit., p. 23-26.
  28. Johan Heliot, Alter Jérémy, Paris, Mango, « Autres mondes », 2005, p. 109.
  29. Danielle Martinigol, C.H.A.R.L.E.x, op. cit., p. 10.
  30. Jeanne-A. Debats, EdeN en sursis, Paris, Syros, « Soon », 2009, p. 9, 10, 131.
  31. Harry Harrison, Marvin Minsky, Le Problème de Turing, Robert Laffont, 1994 [1992].
  32. Yves Grevet, Des ados parfaits, op. cit., p. 103-104.
  33. Jesper Wung-Sung, Les Copies, op. cit., p. 17, 28-29.
  34. Danielle Martinigol, C.H.A.R.L.E.x, op. cit., p. 17.
  35. Id., p. 107, 165.
  36. Danielle Martinigol, C.H.A.R.L.E.x, op. cit., p. 12, 204.
  37. Christophe Lambert, L’Effet Pygmalion, op. cit., p. 59-60.
  38. La citation de la page 12 du roman fait référence à un ouvrage précédent de D. Martinigol dans lequel, pour la première fois, elle introduisait le personnage du cyborg. Charlex (2013) sonne dès lors un peu comme la revanche féministe (tardive ?) sur elle-même de l’auteure des Oubliés de Vulcain (1995).
  39. Voir Philippe Clermont, « Identités de sexe, identités de genre : le roman pour adolescent-e-s est-il engagé ? », in Benert, Britta, Clermont, Philippe (éd.), Contre l’innocence – Esthétique de l’engagement en littérature de jeunesse, Berne, Peter Lang, 2011.
  40. A l’exception de Draco (Debats, 2009) et Adam (Simard, 2010), rappelons-le.
  41. Christophe Lambert, L’Effet Pygmalion, op. cit., p. 222 ; Jeanne-A. Debats, EdeN en sursis, op. cit., p. 160 ; ou, plus rarement, sujets de non droit : Wung-Sung, 2015.
  42. Nous soulignons : « Je suis humaine. Tous les Améliorés le sont depuis le premier Charley. » (Martigol, 2013 : 178) ; « Parce ce que je suis... » (Heliot, 2005 : 57, la prise de conscience de sa nature par l’« alter » réside dans la suspension) ; « Tu es une copie, exactement comme moi. » (Wung-Sung, 2015 : 29) ; « Si je pense comme un humain ? Si je ris, si je souffre comme un humain ? Dis-moi donc ce qui me différencie de toi... » (Éva à Ned, « je pense donc je suis », Lambert, 2018 : 158) ; « Nous sommes des clones. » (Grevet, 2014 : 103).
  43. Nathalie Prince, La littérature de jeunesse en question(s), Rennes, Presses universitaires, 2009, p. 11.
  44. Danielle Martinigol, C.H.A.R.L.E.x, op. cit., p. 204.
  45. A cet égard, on peut prendre pour preuve l’initiative du Parlement européen qui a adopté une résolution (16 février 2017) pour inciter la Commission européenne à initier un texte législatif sur des règles de droit civil sur la robotique... en s’appuyant sur ce que lui ont inspiré les trois lois fictionnelles de la robotique imaginées par Asimov !