Des aventuriers en vacances : hétérotopie et liberté

Des aventuriers en vacances : hétérotopie et liberté

Par DEOM Laurent

Au milieu des années 1950, les éditions Hachette commencent à traduire en français la série The Famous Five (Le Club des Cinq) d’Enid Blyton, dont la publication originale a commencé une quinzaine d’années plus tôt. Le succès, immédiat, se révélera durable, comme en témoignent les chiffres de vente 1. L’engouement du public encourage Hachette à susciter une production directement écrite en français qui reprenne les caractéristiques des histoires de Blyton : des enfants ou des adolescents en groupe, hors de la surveillance des adultes, vivent des aventures près de chez eux durant les vacances. Paul-Jacques Bonzon, en particulier avec Les Six Compagnons, campera ces aventures dans la région lyonnaise puis dans d’autres coins de France 2, dans une série qui comptera un grand nombre de tomes 3 et qui connaîtra même une brève existence à la télévision 4.

Si les Trente Glorieuses se montrent friandes de ce type de littérature 5, celle-ci est cependant antérieure à cette époque : dans l’entre-deux-guerres déjà, la Grande-Bretagne connaît ce que l’on appelle parfois les holiday stories 6 ou les holiday romances 7, ces expressions désignant souvent 8 des aventures qui se déroulent pendant les vacances et mettent en scène des groupes de jeunes héros. La figure tutélaire de cette vogue est sans conteste Arthur Ransome. Lorsqu’il publie Swallows and Amazons en 1930, puis Swallowdale en 1931, ces œuvres ne rencontrent qu’un succès mitigé. Il faut attendre Peter Duck, en 1932, pour que la popularité de ces fictions de vacances soit établie. Celle-ci ne tarde pas à faire des émules : Mary Evelyn Atkinson avec les aventures de la famille Locket 9, Katharine Hull et Pamela Whitlock avec leur roman The Far-Distant Oxus (1937), Norman Dale avec sa trilogie Tim Forest 10, sans oublier Enid Blyton, qui inscrit exactement ses Famous Five 11 d’abord, ses Secret Seven 12 ensuite, dans la configuration établie par Ransome. L’influence de celui-ci sur la littérature de jeunesse britannique est ainsi considérable dans les années qui suivent la publication de ses romans 13.

Ces histoires dans lesquelles des enfants ou des adolescents jouissent d’une certaine autonomie sont typiques de la littérature de jeunesse de l’entre-deux-guerres : « Plus libres de leurs paroles, plus indépendants dans leurs décisions et leurs actes, ces héros se distinguent des modèles romanesques du XIXe siècle 14 », écrit Mathilde Lévêque à propos des œuvres produites en France et en Allemagne. La vogue britannique des holiday stories n’a toutefois guère d’équivalent en France avant les années 1950. Nous montrerons que si, à cette époque, le roman scout semble être le seul courant qui s’inscrive dans la même veine, c’est parce que, comme les holiday stories, il se situe dans une tradition qui valorise le rêve et sa réalisation.

 

Grande-Bretagne : de l’aventure féerique à la holiday story

Constatant l’importance prise dans la littérature de jeunesse par l’écriture féerique d’une part et par les thèmes et les structures narratives du roman d’aventures d’autre part, Christian Chelebourg observe que le croisement de ces deux influences a donné naissance à « une forme originale de littérature de jeunesse que l’on pourrait qualifier de roman d’aventures féeriques 15 ». Chez Lewis Carroll, l’espace onirique du Pays des merveilles permet à Alice de découvrir, loin de ses parents ou de ses éducateurs, des mœurs différentes de celles auxquelles son éducation de fillette victorienne l’avait préparée. Il faut toutefois attendre Edith Nesbit pour que l’aventure féerique s’exprime sur un mode qui préfigure les holiday stories : des enfants en groupe (il s’agit de fratries) y vivent l’aventure en marge des contraintes imposées par les adultes, et en particulier de l’espace-temps scolaire. En ce début de XXe siècle, en effet, l’école s’est imposée dans la vie des enfants britanniques : si la petite Alice n’était pas tenue de s’y rendre (la fréquentation scolaire « obligatoire et complète jusqu’à 10 ans16 » est prévue par l’Education Act de 1876, une dizaine d’années après la publication d’Alice’s Adventures in Wonderland [1865]), les jeunes héros d’Edith Nesbit sont censés être scolarisés jusqu’à douze ans au moins 17. Pour ces écoliers, les vacances — qui sont parfois désignées explicitement dans l’œuvre 18 — représentent ainsi une rupture par rapport au temps contraignant de l’école. Quant à l’espace qui accueille cette césure, il constitue lui aussi une parenthèse dans le cours habituel de l’existence. L’arrivée de la famille dans Five Children and It (1902) montre combien la maison de campagne permet aux enfants de s’extraire de la vie urbaine :

 

But the house was deep in the country, with no other house in sight, and the children had been in London for two years, without so much as once going to the seaside even for a day by an excursion train, and so the White House seemed to them a sort of Fairy Palace set down in an Earthly Paradise. For London is like prison for children, especially if their relations are not rich  19.

 

Le temps des vacances est, de cette façon, redoublé par l’espace des vacances, formant un espace-temps propice à l’exploration et à la liberté :

 

The best part of it all was that there were no rules about not going to places and not doing things. In London almost everything is labelled « You mustn’t touch, » and though the label is invisible it’s just as bad, because you know it’s there, or if you don’t you very soon get told  20.

 

On peut ainsi identifier un chronotope spécifique, en marge non seulement de la scolarité, mais également des contraintes de la vie urbaine.

Chez Nesbit, la liberté aventureuse du chronotope des vacances est d’autant plus prégnante que le merveilleux contribue à la réaliser pleinement.

 

Durant l’ère victorienne, les récits d’imagination destinés à la jeunesse commençaient parfois dans le monde réel, mais ce cadre quotidien était vite remplacé par quelque Pays des Merveilles, ou Pays de Nulle Part. Une des plus brillantes innovations d’Edith Nesbit a été de renverser le processus et de faire naître le merveilleux au cœur du Londres moderne  21,

 

écrit Alison Lurie. Selon elle, « [l]orsque les auteurs choisissent d’écrire des contes merveilleux, ils en font souvent une métaphore de l’imaginaire 22 ». Il arrive que celui-ci se coule dans des formes conventionnelles et s’affadisse par stéréotypie. « En revanche, le véritable pouvoir de l’imaginaire, comme celui d’Edith Nesbit, est suffisamment fort pour transfigurer la scène contemporaine la plus prosaïque […] 23. » Parce qu’elles se situent d’emblée en rupture avec l’espace et le temps ordinaires, les vacances représentent un chronotope tout prêt à recevoir l’extraordinaire, qui chez Nesbit prend la forme du merveilleux. Quelquefois, celui-ci est suscité par l’enthousiasme des enfants à la lecture de récits qui les ont enchantés. Un exemple se rencontre dans Five Children and It : alors que Cyril est en train de lire The Last of the Mohicans de Fenimore Cooper, il se prend à souhaiter que des Indiens puissent se rencontrer en Angleterre —

 

Probably the day would have been a greater success if Cyril had not been reading The Last of the Mohicans. The story was running in his head at breakfast, and as he took his third cup of tea he said dreamily, « I wish there were Red Indians in England — not big ones, you know, but little ones, just about the right size for us to fight »  24.

 

La fée Psammead croira devoir exaucer ce souhait — même s’il n’était en fait qu’une rêverie (« dreamily ») involontaire.

Il est difficile de ne pas remarquer les points communs existant entre ces éléments de l’œuvre de Nesbit et la manière dont Ransome configure ses holiday stories. Une différence importante existe néanmoins : chez l’auteur de Swallows et Amazons, la magie n’est plus convoquée pour réaliser la rêverie des jeunes personnages, dont l’imagination suffit à transfigurer le réel selon leurs désirs. Ceux-ci sont largement conditionnés par les récits aventureux du patrimoine de la littérature de jeunesse britannique, comme le montre déjà le premier tome des holiday stories de Ransome : il évoque explicitement la robinsonnade (le chapitre XVIII est intitulé « Robinson Crusoe and Man Friday ») aussi bien que le souvenir de Treasure Island de Robert Louis Stevenson (l’Oncle James est surnommé « Captain Flint », comme le personnage de Stevenson, car Mary aime à voir un pirate dans cet homme qui habite une péniche) ; l’aventure se déroule d’ailleurs sur une île, motif essentiel à la fois dans la robinsonnade et dans les chasses au trésor telle que celle de l’auteur écossais. Non seulement le roman d’aventures sert de modèle à Ransome, mais l’histoire qu’il écrit permet à ses personnages de mettre en acte cet intertexte, dont l’irruption dans le quotidien des enfants embellit leur existence. L’absence de féerie rend plus vraisemblable l’aventure vécue : celle-ci devient accessible au jeune lecteur, alors que la magie la rendait essentiellement illusoire 25. Plus tard, Enid Blyton jouera elle aussi d’une manière explicite avec l’intertextualité, rappelant Stevenson dans le titre du premier tome des Famous Five (Famous Five and the Treasure Island) et empruntant à la school story le nom de deux de ses bandes (les « Famous Five » et les « Secret Seven » proviennent de récits publiés par Frank Richards dans le périodique The Magnet 26). Ransome ne se contente cependant pas de ces allusions : ses personnages vont jusqu’à incarner un rôle valorisé par la tradition littéraire — « She then became Robinson Crusoe, and went down into the camp to take command of her island27»

Que ce soit chez Nesbit ou chez Ransome, le chronotope des vacances n’est donc pas seulement un espace-temps de divertissement où l’on oublie les contraintes de la vie ordinaire : il rend possible l’avènement d’une nouvelle réalité, informée par la fiction aventureuse. En cela, il constitue un hétérotope. Selon Michel Foucault, l’hétérotopie d’un espace se caractérise par sa discontinuité avec ce qui l’entoure. Cet espace marginal est tout indiqué pour accueillir l’écart par rapport à la norme et le développement de nouvelles règles 28. Nesbit est, à cet égard, plus audacieuse que l’auteur de Swallows and Amazons : ses engagements politiques la conduisant à proposer « des solutions socialistes aux problèmes du moment 29 », l’autonomie des enfants traduit chez elle une revendication plus radicale de liberté. Chez Ransome, l’hétérotope aventureux — qui prend, classiquement, la forme d’une île — n’est pas lié à des contre-valeurs très élaborées ; du moins permet-il aux enfants de laisser libre cours à leur imagination sans que les adultes ne viennent la brider. Dans les deux cas, toutefois, il n’est pas question de faire table rase du passé : la mémoire littéraire constitue un héritage qui est non seulement accepté, mais valorisé en tant qu’instrument de liberté.

 

France : l’exception du roman scout

À la même époque, la France ne semble guère touchée par l’engouement britannique pour les holiday stories : en dépit des traductions de Ransome éditées dans la collection « Heures joyeuses » à partir de 1934 30, les productions directement écrites en français ne sont pas nombreuses avant la fin des années 1950 31. C’est que la littérature de jeunesse française ne s’inscrit pas dans la même généalogie que son homologue d’outre-Manche. Si les récits d’aventures du patrimoine britannique sont bien connus en France, grâce à de nombreuses traductions qui bénéficient depuis longtemps d’une bonne diffusion, l’aventure féerique, en revanche, y demeure longtemps méconnue. Alice’s Adventures in Wonderland est traduit dès 1869 (mais à Londres, chez Macmillan) et est adapté par Larousse en 1910, mais Edith Nesbit ne perce pas vraiment en France : La Fée des sables est publié par Hachette en 1906 et réédité en 1911, et il faut attendre 1981 pour qu’un autre ouvrage de cet auteur (La Chasse au trésor) soit édité en français.

Ce type d’aventure pâtit probablement de la méfiance qui s’observe à l’égard de la féerie dans la littérature de jeunesse française des XIXe et XXe siècles. Étudiant le conte de fées scientifique du XIXe siècle, Laurence Talairach-Vielmas constate que l’alliance de la science et du merveilleux se réalise d’une manière très différente en France et en Angleterre :

 

Contrairement à l’Angleterre, où le merveilleux […] fait partie du discours scientifique, supplantant les failles de ce dernier, tout en attirant les lecteurs vers des mondes sensationnels, en France le débat bat son plein entre sciences et merveilles tout au long de la deuxième moitié du siècle  32.

 

Sans doute le rationalisme qui, du cartésianisme au positivisme, en passant par les Lumières, irrigue les mentalités éducatives françaises et les produits culturels qui leur sont associés, explique-t-il cette méfiance à l’égard de la féerie. Celle-ci se révélera timidement 33 sous la forme d’un réalisme merveilleux peut-être encouragé par la diffusion du bergsonisme et de sa valorisation de l’intuition, à rebours de la doctrine des héritiers d’Auguste Comte.

Les aventures collectives de jeunes gens durant les vacances ne sont pas tout à fait absentes de la littérature de jeunesse française : on pense à Deux Ans de vacances de Jules Verne (1888), dont le propos est de « montrer une troupe d’enfants de huit à treize ans, abandonnés dans une île, luttant pour la vie au milieu des passions entretenues par les différences de nationalité, — en un mot, un pensionnat de Robinsons 34 ». Toutefois, malgré la mention des vacances dans le titre du roman, celles-ci, qui sont la conséquence tragique d’un naufrage, n’ont pas grand-chose de commun avec le dépaysement, géographiquement proche, des aventures de Ransome. En Suisse, Le Secret de la porte de fer de Gaston Clerc 35 présente, en 1913, une poignée d’adolescents partis à l’aventure dans les souterrains d’un château ; peut-être peut-on y voir le prototype francophone des holiday stories, encore que les vacances n’y soient pas présentées comme la parenthèse enchantée qu’en feront Ransome, Blyton et leurs épigones. Il n’est en tout cas pas indifférent que Gaston Clerc ait été l’un des promoteurs du scoutisme en Suisse 36. En effet, si la holiday story peut être rencontrée en France et dans le monde francophone de l’entre-deux-guerres et jusqu’aux années 1950, c’est par le roman scout en particulier qu’on la trouve représentée.

En général, le roman scout met en scène des jeunes gens agissant d’une manière autonome. Le scoutisme est en effet une méthode d’éducation qui accorde une place centrale à la patrouille, ce groupe de quelques adolescents placés sous l’autorité de l’un d’entre eux. Dès les premiers romans scouts publiés en français, l’aventure est à l’honneur, à tel point qu’elle prime sur les spécificités du scoutisme : pour ces récits s’inscrivant dans une veine populaire, l’objectif n’est pas tant d’illustrer le scoutisme naissant que de renouveler la matière d’intrigues aventureuses parfois usées 37. Ils se déroulent ainsi souvent dans des lieux exotiques, pourvoyeurs d’un dépaysement immédiat, très différent de celui des holiday stories. Cette configuration change avec la publication en 1927 de La Rude Nuit de Kervizel de Pierre Delsuc 38 : d’une part, il s’agit du premier ouvrage qui soit sous-titré « roman scout » ; d’autre part, au lieu des aventures rocambolesques de la période précédente, ce récit présente une histoire plus vraisemblable (même s’il n’est pas courant, quand on est un scout de quinze ans, de se battre contre des espions de la Tchéka). En outre, l’aventure se déroule dans le chronotope des vacances : les scouts, en congé, campent non loin de chez eux, en Bretagne. Cependant, même si le récit se plaît à dépeindre une terre mystérieuse aux allures légendaires, le dépaysement qu’elle procure n’est pas, comme chez Ransome, le produit de l’imagination des jeunes héros.

Sans doute est-ce dans Le Relais de la Chance au roy (1941) de Jean-Louis Foncine que la proximité du roman scout avec l’œuvre du Britannique apparaît de la manière la plus éclatante. Durant les vacances de Pâques, une patrouille de scouts vit, au sein d’un « Pays perdu » franc-comtois, une aventure qui ressemble à certaines histoires popularisées par la littérature de jeunesse : comme chez Ransome, on trouve chez Foncine des allusions à Robinson Crusoé (un jeune berger est surnommé « Jeudi » au motif que « cela rappellera tout à fait Robinson Crusoé 39 »), et le roman d’aventures maritimes à la Stevenson y est remplacé par le western de Buffalo Bill (« Que faisaient Buffalo Bill et ses éclaireurs avant d’aller explorer le Grand Canyon de la mort 40 ? »). La fin du récit dévoile les ressorts de l’aventure vécue par les héros : il s’agissait d’un jeu mis en scène par leurs chefs et par les garçons d’une troupe de la région.

Foncine n’est pas le seul romancier scout à s’inscrire dans cette voie. Par exemple, deux ans plus tard, le Belge Louis Picalausa publie chez Casterman Sur la piste du Sapin Vert, où le dépaysement est également produit par le rappel de la littérature aventureuse :

 

L’idée des Sapins Verts le [Gody] hante depuis l’enfance. Nous sommes tout gosses qu’elle le tient déjà. Il habite alors une villa sur les hauteurs, au milieu de deux hectares de terrain boisé, vallonné et sauvage. Une pièce d’eau s’y étale au pied d’une rocaille artificielle. Lui ne rêve que Peaux-Rouges et coureurs de pistes. Il improvise des costumes d’indiens [sic], ornés de verroteries, de mouvantes coiffures de plumes. Avec quelques-uns de ses condisciples, paysans à peine dégrossis, qu’estomaquent ces jeux bizarres, il interprète les histoires de Buffalo-Bill et de Sitting-Bull. Ses cousines, terrorisées par nos danses du scalp, sont d’autorité peinturlurées en squaws. Même Bobby, — dit « Collier de Cheval », — chien roux pareil à un renard domestiqué, est sacrifié à la couleur locale. On lui attache, au bout de sa queue touffue, une penne blanche de canard, ennoblie en rémige d’aigle par une tache d’encre  41.

 

Dans cet extrait, le chronotope des vacances n’est pas clairement établi. On peut néanmoins estimer que les enfants ne sont pas à l’école, et le lieu, à la fois proche et dépaysant, correspond à ce que l’on pourrait trouver chez Ransome ou chez Foncine. Quant aux références à l’univers western, elles ne se limitent pas à un simple décorum intertextuel : il s’agit, pour les personnages, de feindre qu’ils se trouvent dans ce cadre. Les coulisses de l’imitation sont toutefois dévoilées : il est question de « costumes », de « jeux » et d’interprétation — y compris pour l’animal de compagnie qui, en dépit de sa parure, reste bel et bien un chien déguisé en aigle. Cette mise en scène ludique n’a rien d’étonnant dans un roman scout. Baden-Powell a en effet installé le jeu à la base de sa pédagogie, et en particulier le jeu nourri de références fictionnelles 42, si bien que le scoutisme apparaît dès sa création comme une « pédagogie du simulacre », selon l’expression de Daniel Denis 43. Le capitaine Royet, qui fut l’un des pionniers du scoutisme en France (et qui écrivit lui-même un roman scout 44), résumait ainsi le programme du mouvement : « Après avoir mis les jeunes imaginations en marche, il précise le rêve en le portant sur scène. Voilà donc notre scout posé dans son personnage de héros d’aventure 45. » Cette utilisation de l’imaginaire fictionnel proposée par le scoutisme britannique bousculait les conceptions françaises de l’époque. Alors que Pierre de Coubertin et sa Ligue d’éducation nationale souhaitent infléchir le scoutisme dans le sens du « culte bien français du “débrouillard” 46 », Pierre Benoît, cofondateur des Éclaireurs de France, refuse cette attitude qui appauvrirait la méthode britannique originelle et fustige ceux qui « “[…] ne font pas assez appel au côté romanesque, aventureux, imaginatif des enfants” et négligent les “exercices rappelant les exploits en pays sauvage”, c’est-à-dire, au fond, tous “les éléments importants capables d’attirer les enfants bien qu’ils paraissent futiles aux universitaires” 47 ». Les Scouts de France, fondés au début des années 1920, reprendront cette idée, promise à un bel avenir, de la mise en scène du rêve dans un territoire proche, rendu exotique par des références légendaires ou aventureuses, qui permet à des adolescents d’agir dans une liberté discrètement régulée par les adultes organisateurs 48.

 

La réalisation du rêve

La mise en scène est précisément ce que Foncine tente de gommer dans Le Relais de la Chance au roy. Un rôle particulier y est dévolu à Jean-Pierre, considéré comme le détective de la patrouille des Hirondelles. Parce qu’il est un lecteur assidu de fictions aventureuses et policières, il ne se contente pas de jeux scouts qui feraient semblant de rejouer ces fictions : « — Des jeux ! Des jeux ! J’aimerais bien un jour une aventure pour de vrai 49. » À la fin du prologue, il réitère ce souhait : « — Tout de même, si c’était possible… une aventure vraie 50 ! » La suite du récit semble exaucer ses vœux : dès la page suivante, la patrouille se trouve au cœur d’un Pays perdu où elle connaîtra des événements dignes des histoires qui passionnent Jean-Pierre. Avec ces aventures en bande, marquées par l’intertextualité, dans le chronotope des vacances, le schéma des holiday stories est identifiable. Il est ici précisé dans le sens de la rêverie. Le prologue montre en effet Jean-Pierre au lycée, dans un cadre opposé à celui des vacances. Celles-ci, toutefois, ne sont pas loin : la claustration de l’école se fracture et laisse présager une libération —

 

Le surveillant s’est approché de la fenêtre, il l’a entrouverte et il ne l’a pas refermée ; il semble qu’il vient de secouer d’un seul geste toute la poussière de l’hiver : l’étude chaude, l’odeur de papiers poussiéreux, les lectures de notes solennelles et perfides, les séances de gymnastique dans la salle chaude qui sent la sciure  51

 

Le temps, lui aussi, s’ouvre sur les vacances prochaines :

 

Dissimulées dans la couverture rose du cours de géométrie, il y a les éphémérides de la délivrance : le précieux calendrier où l’on raie un par un les jours écoulés, souvenirs incolores que l’on balaie comme des feuilles jaunies attardées dans les encoignures des cours de récréation  52.

 

Cette promesse de libération, qui annonce le chronotope des vacances, est soumise au régime de la rêverie : les premières lignes du prologue installent une atmosphère crépusculaire (« un espace de temps qui va grandissant, qui n’est plus ni le jour ni la nuit 53 ») dans laquelle Jean-Pierre, « les yeux clos 54 », se revoit en « rêve 55 » au camp de Pâques de l’année précédente. Juste après le prologue, ce rêve de vacances se concrétise en un chronotope réalisé. Si l’aventure vécue par les personnages correspond à une intertextualité en acte, c’est parce qu’elle-même est le produit de l’activité d’un rêveur que l’aventure littéraire a enchanté. C’est la même tendance à la réalisation de la rêverie que l’on trouvait dans Five Children and It de Nesbit, à ceci près qu’elle y était opérée par la magie. Chez Foncine, et dans la majeure partie des romans scouts, nul appel au surnaturel : la réalisation de l’irréel passe par l’enchantement du verbe du rêveur 56.

Ainsi le chronotope des vacances représente-t-il la rencontre paradoxale entre l’espace-temps du rêve et la réalité vraisemblable d’un temps de loisir passé près de chez soi. Cette alliance d’éléments apparemment incompatibles en fait un hétérotope au sens fort du terme, c’est-à-dire un espace où sont mises en jeu les normes instituées. Le Relais de la Chance au roy encourage d’ailleurs le renversement des valeurs couramment admises, préférant substituer aux activités sérieuses des grandes personnes la vie rénovée par le jeu et par la fraternité. Le dernier dialogue du roman se termine sur cette prise de parole : « — […] les gamins que nous sommes n’ont pas dit leur dernier mot 57 ! » Celle-ci fait écho à un avant-propos qui proclamait ce crédo : « Je vous le dis, le jour est peut-être proche où notre jeu sera la vie et où la vie, au sens étriqué où l’entendent les hommes de maintenant, comptera pour des haricots 58 ! » À rebours des conventions des adultes et de leurs faux-semblants, les adolescents sont invités à instaurer une nouvelle façon de voir et de vivre le monde, une hétérotopie où l’illusion devient réelle — et le réel des grandes personnes, illusoire.

En ce sens, le roman scout tel qu’il est conçu par Foncine possède une dimension anti-institutionnelle : il se situe à l’écart des normes des adultes, et même en marge de l’institution scoute elle-même, comme le montre le quatrième tome des Chroniques du Pays perdu, Le Foulard de sang (1946), qui narre les exploits d’une chevalerie secrète d’adolescents constituée au sein du scoutisme — une marge au sein de l’institution et de ses conventions. En cela, il se distingue de l’utilisation qui est parfois faite du rêve dans la littérature de jeunesse de l’entre-deux-guerres. En France, L’Île rose (1924) de Charles Vildrac constitue un exemple d’hétérotopie suscitée par le rêve : le jeune Tiffernand, en songe 59, imagine un enchanteur qui l’emmène dans une île aux couleurs des désirs de l’enfant. Cependant, ce roman est avant tout une utopie éducative 60 : Mathilde Lévêque a montré que « [l]es conceptions pédagogiques de Vildrac » pouvaient être « rapprochées des propos d’un des fondateurs de la pédagogie moderne, John Dewey 61 ». Pour l’auteur de L’Île rose, comme pour d’autres écrivains des années 1930, l’écriture est « indissociable d’un engagement idéologique au sens large, qu’il s’agisse d’un intérêt pédagogique ou de préoccupations plus directement politiques62 ». Quoique elle fasse la part belle à la liberté de l’enfant 63, cette hétérotopie le laisse inféodé aux adultes et à leurs spéculations pédagogiques — car l’on sait que les projets éducatifs, même lorsqu’ils se situaient dans la mouvance de l’Éducation nouvelle, ont « dû s’inscrire dans une entreprise de consolidation du monde tel qu’il existait et tel qu’il entendait bien continuer d’exister 64 ». Au contraire, rêveurs d’hétérotopes où la rêverie serait reine, les adultes de Foncine transmettent d’abord les valeurs de l’aventure rêvée.

 

Conclusion

Au lieu de l’utopie, de sa rationalité et de son éloignement du rêve 65, le roman scout de la holiday story se situe dans le sillage d’un imaginaire paradisiaque où la liberté de la jeunesse est vivifiée par une fiction valorisée 66. Il rejoint ainsi, à sa manière, Edith Nesbit qui montre que la magie peut survenir au sein de la vie quotidienne, ou Arthur Ransome chez qui la fiction devient réalité. De cette façon, avant la vogue lancée par Hachette, il introduit en France un modèle romanesque que l’importation du scoutisme a rendu possible dans un pays qui, à cette époque, était pourtant méfiant à l’égard du mélange du rêve et de la réalité.

 

  1. Environ cinquante millions d’exemplaires vendus de 1955 à 1982 (voir Michèle Piquard, L’Édition pour la jeunesse en France de 1945 à 1980, Paris, Presses de l’ENSSIB, coll. « Référence », 2004, p. 218).
  2. Plusieurs récits écrits par Bonzon se déroulent loin de la France, en Afrique (Les Six Compagnons et les Espions du ciel, Paris, Hachette, « Bibliothèque verte », 1971 ; Les Six Compagnons et les Piroguiers, Paris, Hachette, « Bibliothèque verte », 1978) ou en Norvège (Les Six Compagnons et les Bébés phoques, Paris, Hachette, « Bibliothèque verte », 1980).
  3. Les trente-huit premiers tomes sont signés par Bonzon (du tome I, Les Compagnons de la Croix-Rousse, Paris, Hachette, « Bibliothèque verte », 1961, au tome XXXVIII, Les Six Compagnons dans la Ville rose, Paris, Hachette, « Bibliothèque verte », 1980).
  4. Les Compagnons de l’aventure : les Six Compagnons, France, T.F.1, 1989 (sept épisodes).
  5. Voir Aurélie Gille Comte-Sponville, Modernité et Archaïsme des lieux dans les romans d’enquête et d’aventure pour la jeunesse pendant les Trente Glorieuses en France, thèse de doctorat en études littéraires françaises, Francis Marcoin (dir.), Arras, Université d’Artois, 2016.
  6. Voir Peter Hunt, « Ransome, Arthur », p. 320-322, in Jack Zipes (dir.), The Oxford Encyclopedia of Children’s Literature, t. III : Luca—Slot, New York, Oxford University Press, 2006, p. 320.
  7. Voir Ganna Ottevaere-van Praag, Histoire du récit pour la jeunesse au xxe siècle (1929-2000), Bruxelles, P.I.E.-Peter Lang, 1999, p. 12.
  8. Pas toujours : elles s’emploient également couramment à propos d’histoires relatives aux fêtes de fin d’année.
  9. Quatorze tomes publiés entre 1936 (August Adventure) et 1950 (Steeple Folly).
  10. The Exciting Journey (1948), Merry Christmas (1948), Skeleton Island (1949).
  11. De Five on a Treasure Island (1942) à Five Are Together Again (1963).
  12. De The Secret Seven (1949) à Fun for the Secret Seven (1963). Avant le premier roman de la série, une nouvelle avait été consacrée au même groupe (At Seaside Cottage, 1947) ; d’autres nouvelles suivront, qui seront rassemblées ultérieurement en un volume (The Secret Seven Short Story Collection, 1997). Si, comme dans The Famous Five, la matière policière est présente dans The Secret Seven, la dimension aventureuse y est peut-être moins systématique.
  13. « […] it became the accepted notion for the rest 30 years or so that children enjoyed reading stories about children on holiday, who had plausible but exciting adventures involving such “props” as boats and horses. » (Humphrey Carpenter, Mary Prichard, « Ransome, Arthur (Michell) », p. 441-443, in Humphrey Carpenter, Mary Prichard, The Oxford Companion to Children’s Literature, Oxford – New York, Oxford University Press, 1984, p. 443.)
  14. Mathilde Lévêque, Écrire pour la jeunesse en France et en Allemagne dans l’entre-deux-guerres, Rennes, Presses universitaires de Rennes, « Interférences », 2011, p. 51.
  15. Christian Chelebourg, Francis Marcoin, La Littérature de jeunesse, Paris, Armand Colin, « 128 », 2007, p. 115.
  16. Jean Dulck, L’Enseignement en Grande-Bretagne, Paris, Armand Colin, « U », 1968, p. 74-75.
  17. Id., p. 75.
  18. « (You will remember that the happily-situated house where these children were spending their holidays lay between a chalk-quarry and a gravel-pit.) » (Edith Nesbit, Five Children and It, New York, Dodd, Mead & Company, 1905 [1902], p. 75.)
  19. Id., p. 2.
  20. Id., p. 5.
  21. Alison Lurie, « Le Merveilleux moderne : Edith Nesbit », p. 133-156, Ne le dites pas aux grands : essai sur la littérature enfantine, Monique Cassagnol (trad.), Paris, Payot & Rivages, « Rivages poche », 1999 [1990], p. 147.
  22. Id., p. 149.
  23. Ibid.
  24. Edith Nesbit, Five Children and It, op. cit., p. 261.
  25. Notons que Nesbit associait déjà au surnaturel une transfiguration rendue possible par les artifices de l’imagination et du langage : ainsi, elle transforme la brume dorée des cheminées de la vallée en un paysage digne des Mille et Une Nuits — « The White House was on the edge of a hill, with a wood behind it — and the chalk-quarry on one side and the gravel-pit on the other. Down at the bottom of the hill was a level plain, with queer-shaped white buildings where people burnt lime, and a big red brewery and other houses ; and when the big chimneys were smoking and the sun was setting, the valley looked as if it was filled with golden mist, and the limekilns and hop-drying houses glimmered and glittered till they were like an enchanted city out of the Arabian Nights. » (Id., p. 5.)
  26. Voir notamment Humphrey Carpenter, Mari Prichard, « Billy Bunter », p. 62-64, in Humphrey Carpenter, Mari Prichard, The Oxford Companion to Children’s Literature, op. cit., p. 62.
  27. Arthur Ransome, Swallows and Amazons, Londres, Red Fox, 2010 [1930], p. 198.
  28. Michel Foucault, « Des espaces autres », p. 1571-1581, in Michel Foucault, Dits et écrits (1954-1988), Daniel Defert, François Ewald (dir. éd.), t. II : 1976-1988, Paris, Gallimard, « Quarto », 2001 [1984].
  29. Alison Lurie, « Le Merveilleux moderne : Edith Nesbit », p. 133-156, in Alison Lurie, Ne le dites pas aux grands, op. cit., p. 134.
  30. Hirondelles et Amazones, Germaine Guillemot (trad.), Paris, Aubier, « Heures joyeuses », 1934 ; Le Vallon des hirondelles, Germaine Guillemot-Magitot (trad.), Paris, G.-T. Rageot, « Heures joyeuses », 1945 ; Hirondelles dans la neige, Germaine Guillemot-Magitot (trad.), Paris, G.-T. Rageot, « Heures joyeuses », 1946 ; Le Club des Foulques, Germaine Guillemot-Magitot (trad.), Paris, G.-T. Rageot, « Heures joyeuses », 1947 ; Le Trésor de Peter Duck, Germaine Guillemot-Magitot (trad.), Paris, G.-T. Rageot, « Heures joyeuses », 1947 ; Pigeons voyageurs et Chercheurs d’or, Germaine Guillemot-Magitot (trad.), Paris, G.-T. Rageot, « Heures joyeuses », 1949 ; Nous ne voulions pas aller en mer, Germaine Guillemot-Magitot (trad.), Paris, G.-T. Rageot, « Heures joyeuses », 1951. Hirondelles et Amazones semble être le seul à avoir été réédité (une seule fois, en 1955).
  31. Citons par exemple, pour l’année 1959, Le Grand Jeu de Païolive de René Duverne (Paris–Tours, Fleurus–Mame, « Monique », 1959) ou encore L’Escalier bleu de Renée Aurembou (Paris, G.P., « Bibliothèque Rouge & Or », 1959).
  32. Laurence Talairach-Vielmas, « Au Pays des merveilles : science et contes de fées », La Clé des langues, 08/07/2009, http://cle.ens-lyon.fr/anglais/litterature/litterature-britannique/litterature-jeunesse/au-pays-des-merveilles-science-et-contes-de-fees.
  33. Un certain nombre d’œuvres notables du réalisme merveilleux en littérature de jeunesse sont d’abord publiées pour les adultes : Le Grand Meaulnes (1913) d’Alain-Fournier, L’Âne Culotte (1937) et L’Enfant et la Rivière (1945) d’Henri Bosco, Le Petit Prince (1943) de Saint-Exupéry, Le Pays où l’on n’arrive jamais (1955) d’André Dhôtel, etc.
  34. Jules Verne, Deux Ans de vacances, Paris, Hetzel, 1909 [1988], p. II.
  35. Gaston Clerc, Le Secret de la porte de fer, Genève, Société générale d’imprimerie, 1913.
  36. Voir Heinz Reber, « Le Secret de la porte de fer (Gaston Clerc [1912]). Un précurseur du roman scout », Ianus bifrons. Revue universitaire de l’adolescence, n° 4, 1992, « Le Roman scout (1927-1962) : un genre littéraire ? », p. 179-185.
  37. Voir Laurent Déom, « L’Aventure scoute en littérature : péripéties, pédagogie et poésie », p. 45-69, in Isabelle-Rachel Casta (dir.), Si d’aventure… : la littérature aventureuse a-t-elle vécu ?, Paris, Le Manuscrit, « Recherche-université », 2009.
  38. Pierre Delsuc, La Rude Nuit de Kervizel, Paris, Spes, « Des fleurs et des fruits », 1927.
  39. Jean-Louis Foncine, Le Relais de la Chance au roy, Paris, Fleurus, « Signe de piste », 1994 [1941], p. 146.
  40. Id., p. 142.
  41. Louis C. Picalausa, Sur la piste du Sapin Vert, Tournai–Paris, Casterman, « Le Rameau vert », 1944 [1943], p. 17.
  42. Voir Daniel Denis, « Une pédagogie du simulacre : l’invention du scoutisme (1900-1912) », Agora débats/jeunesses, n° 11, 1998, « L’Aventure n’est-elle qu’une mode ? », p. 7-18, p. 8.
  43. Voir le titre de son article cité précédemment (id.).
  44. Maximin Léonce Royet, Le Défi d’un boy-scout, Paris, Ferenczi, « Le Livre national. Aventures et voyages », 1925 (édition en volume du roman publié en feuilleton dans Le Journal des voyages du 15 juin 1913 [n° 863] au 8 février 1914 [n° 897]).
  45. Maximin Léonce Royet, « Le Rôle social du scoutisme français », Larousse, 1913, cité par Daniel Denis, « Une pédagogie du simulacre », op. cit., p. 9.
  46. Daniel Denis, « Une pédagogie du simulacre », op. cit., p. 16.
  47. Pierre Benoît, cité ibid.
  48. De nombreux romans scouts se situant dans la mouvance des Scouts de France feront usage de ce que nous avons appelé ailleurs le « chronotope du Grand Jeu », qui représente l’une des modalités du chronotope des vacances (Laurent Déom, « Le Roman scout dans les années trente et le chronotope du “grand jeu” », Strenæ : recherches sur les livres et objets culturels de l’enfance, n° 6, 2013, « Littérature pour la jeunesse de l’entre-deux-guerres : renouveau et mutations », Mathilde Lévêque, Anne Struve-Deveaux [dir.], 14 §).
  49. Jean-Louis Foncine, Le Relais de la Chance au roy, op. cit., p. 19.
  50. Id., p. 20.
  51. Id., p. 13.
  52. Ibid.
  53. Ibid.
  54. Ibid.
  55. Id., p. 14.
  56. L’extrait de Sur la piste du Sapin Vert de Picalausa évoquait également un personnage qui « ne rêve que Peaux-Rouges et coureurs de pistes », un rêve réalisé par la mise en scène ludique.
  57. Jean-Louis Foncine, Le Relais de la Chance au roy, op. cit., p. 205.
  58. Id., p. 12 (le texte original est en italique).
  59. Charles Vildrac, L’Île rose, Paris, Thierry Magnier, 2006 [1924], p. 50.
  60. Même si, comme l’a analysé Martine Jacques, cette utopie est nuancée (« L’Île rose et La Colonie de Charles Vildrac : le modèle utopique en question dans la littérature pour la jeunesse des années vingt », Strenæ, no 6, 2013, op. cit., 25 §).
  61. Mathilde Lévêque, Écrire pour la jeunesse en France et en Allemagne dans l’entre-deux-guerres, op. cit., p. 22.
  62. Id., p. 47.
  63. « Le roman pour la jeunesse apparaît comme l’espace où Vildrac rend possible ce que le réel refuse. » (Id., p. 277.)
  64. Maurice Crubelier, L’Enfance et la jeunesse dans la société française (1800-1950), Paris, Armand Colin, « U », 1979, p. 210.
  65. Voir Jean-Jacques Wunenburger, L’Utopie ou la Crise de l’imaginaire, Paris, Jean-Pierre Delarge, « Encyclopédie universitaire », 1979, p. 10.
  66. Pour Aurélie Gille Comte-Sponville, « l’hétérotopie constitue une version dégradée — mais réelle, au moins — de l’utopie, qui demeure une quête fondamentale dans les romans d’aventure pour la jeunesse qui paraissent pendant les “Trente Glorieuses” » (Modernité et Archaïsme des lieux dans les roman d’enquête et d’aventure pour la jeunesse pendant les Trente Glorieuses en France, op. cit., p. 364). Il nous semble que, dans certains cas, l’hétérotopie apparaît plutôt comme l’une des voies de réalisation possible du mythe paradisiaque.