Nouveaux espaces, anciennes conquêtes : Mécanismes de sacralisation par la colonisation spatiale dans Farmer in the Sky de Robert Heinlein et The Martian Chronicles de Ray Bradbury
Introduction
Les mondes imaginaires, dans le cadre restreint de cette étude, ceux de science-fiction et de fantasy, sont de grands pourvoyeurs d’espaces nouveaux. Ils projettent le lecteur dans la Terre du Milieu pour Tolkien 1, dans l’Empire Galactique dirigé par Trantor, pour Asimov et son cycle Foundation 2, sur le Disque-Monde pour Terry Pratchett 3 ou sur d’autres planètes, Mars pour Edgar Rice Burroughs 4, Vénus pour Pamela Sergent 5, Pern pour Anne McCaffrey 6, Ténébreuse pour Marion Zimmer Bradley7, etc.
Toutefois, ces espaces nouveaux sont chaque fois émaillés d’éléments anciens que le lecteur peut reconnaître. Pern, où les colons sont pourtant arrivés en vaisseau spatial, établit un système féodal où les chevaliers chevauchent des dragons chez McCaffrey ; la prophétie, sous couvert des mathématiques de la psychohistoire, règle le monde d’Asimov ; Tolkien s’inspire librement des mythes scandinaves et même, pour certains passages, de la tradition chrétienne 8 ; Terry Pratchett reprend quant à lui des éléments classiques de la fantasy comme le barbare, le mage, l’artefact capable de détruire le monde, etc., pour les contourner, ainsi que des éléments du passé du lecteur comme l’invention de la poste (Going Postal 9), Hollywood (Moving Pictures 10), l’Australie (The Last Continent 11), le chemin de fer (Raising Steam 12), etc.
Ces emprunts pourraient apparaître comme un paradoxe, voire une faiblesse, faire du neuf avec de l’ancien, sous couvert d’un décor exotique. Ce sont précisément ces éléments anciens que nous nous proposons d’interroger dans leur utilisation et dans leur fonction, grâce, notamment, aux outils proposés par Hans Blumenberg, Roger Caillois et Mircea Eliade, c’est-à-dire, principalement, les notions de sacré, de profane, de mythe ainsi que la sécularisation.
Pour cela, nous avons choisi deux récits de terraformation dans lesquels nous interrogerons la colonisation. La terraformation semble un indispensable prélude, dans notre étude, puisqu’elle génère, selon Chris Pak, un sentiment de nostalgie pastorale 13 qui guiderait les colons à quitter la Terre et à s’implanter sur une nouvelle planète, morte ou presque, et à voir dans la sauvagerie de l’espace son potentiel agricole et même édénique 14. À partir de là, un dialogue débute entre la planète terraformée ou en cours de terraformation et la colonisation. Loin de proposer un espace totalement neuf, la planète se pare de figures anciennes et cultive les paradoxes ; on y retrouve des personnages du passé, l’avenir semble d’écrire une origine, etc.
Ces paradoxes apparaissent avec pertinence dans les deux ouvrages que nous avons choisi d’étudier, The Martian Chronicles 15(1950), de Ray Bradbury, dont les aventures se déroulent sur Mars, et Farmer in the Sky 16(1950), de Robert Heinlein, qui place son action sur Ganymède, satellite de Jupiter, bien que leur finalité soit très différente.
Nous observerons, dans un premier temps, les paradoxes, c’est-à-dire pourquoi et comment dans un récit « futuriste » sont convoquées des figures anciennes et dans quelle mesure l’avenir est lié au passé ; dans un deuxième temps, ce brassage temporel nous amènera à observer les répétitions, à réfléchir sur le temps proprement dit et à le redéfinir ; enfin, nous penserons les conséquences politiques de ces nouvelles temporalités.
Paradoxe : le neuf dans l’ancien
Un des premiers paradoxes qui apparaît dans les deux romans est le recours à des artefacts anciens, c’est-à-dire à des figures du passé, humaines ou non, qui représentent par-delà leur matérialité diégétique une référence pour le lecteur, dans notre étude principalement le Mayflower et le personnage de Johnny Appleseed. Dans Farmer in the Sky, les colons rejoignent Ganymède, dans un vaisseau spatial nommé le Mayflower, et, un peu plus tard, Bill, le personnage principal du roman reçoit de M. Schultz des pépins de pommes, ce qui est une référence directe à Johnny Appleseed. Le Mayflower comme Johnny Appleseed sont des références partagées avec les lecteurs qui les puisent pourtant dans d’autres discours, notamment ceux des manuels scolaires ou de la culture populaire. En exploitant cette intertextualité, Robert Heinlein et Ray Bradbury utilisent des artefacts anciens et connus pour les exploiter à la fois de la même manière, c’est-à-dire comme des marqueurs de la colonisation, et d’une manière inédite, pour écrire une nouvelle histoire, ou une nouvelle fiction si l’on se place du point de vue du lecteur. Ainsi Johnny Appleseed apparaît dans « Green Morning » de Ray Bradbury 17. Le paradoxe conduit donc les personnages à quitter la Terre, et les Etats-Unis, pour retrouver, par-delà l’espace, un personnage des Etats-Unis. Cette apparition, pour Aurélie Villers, « ne dit qu’une chose : ensemencer une terre est une chose que nous avons déjà faite par le passé. La terraformation n’est pas une idée si nouvelle 18 ». Nous pouvons étendre la pensée d’Aurélie Villers à la colonisation, particulièrement dans nos deux récits, et, pour l’instant, reconnaître dans cette pratique davantage la répétition que l’innovation.
Dès lors, il faudrait comprendre les espaces nouveaux que constituent Mars et Ganymède comme la permission de rejouer l’histoire et/ou de retrouver l’histoire comme semble le suggérer une autre nouvelle de Bradbury « Summer Night », appelée aussi « Mars is Heaven », qui dépeint sur Mars une ville idéalisée des années 30.
L’idéalisation de la ville dans « Summer Night », tout comme la rencontre avec Johnny Appleseed 19, paraît dépasser l’histoire et même, toujours selon Aurélie Villers, « constitue un appel au mythe 20 ». Le paradoxe qui amène la rencontre de l’ancien dans le nouveau pourrait-il se résoudre par le biais du mythe ? Cela nous amène à poser, pour le cadre de cet article, les définitions d’histoire et de mythe. L’histoire serait un élément commun partagé par les personnages et le lecteur et se fonderait, pour ces récits, principalement sur l’histoire des États-Unis avec de grandes figures historiques devenues mythiques grâce à la pop culture comme le Mayflower ou Johnny Appleseed. Le mythe, selon Mircea Eliade « raconte comment quelque chose est venu à l’existence : le Monde, l’homme, telle espèce animale, telle institution sociale, etc 21. » et selon Pierre Brunel, « La définition la plus sûre du mythe est celle qui le présente comme un récit des origines […]. Mais le propre de cette origine est qu’elle échappe 22 ». Alors l’histoire, le passé, rencontré dans le futur, pourrait devenir le récit d’une nouvelle origine, paradoxalement connue, ce qui poserait la question de sa fonction. La première réponse pourrait apparaître dans ce qui occupe les mythes, d’après Mircea Eliade, Pierre Brunel, Roger Caillois 23 et Marcel Danesi, c’est-à-dire le sacré. Si la pop culture, pour Marcel Danesi, est « a Theater of the Profane 24 », les artefacts anciens (Johnny Appleseed, le Mayflower, etc.) sont dans le même temps profanes et sacrés, car mythifiés, pour les personnages comme pour le lecteur. Un phénomène de sécularisation 25 apparaît et demande à être interrogé, non pas comme une simple dichotomie sacré/profane, mais plutôt comme un processus.
Dès lors, si Johnny Appleseed, le Mayflower ou la cité idéalisée des années 30 sont profanés dans leur milieu d’origine, la Terre, ils sont ici inscrits dans un processus qui suggère un déplacement et une projection vers un espace nouveau qui leur offre une certaine liberté et interroge le sens même de la sécularisation. Or, selon Myriam Revault d’Allonnes :
Si la « sécularisation » a un sens, ce n’est pas comme mutation ou transposition de contenus authentiquement théologiques qui seraient devenus séculiers en s’aliénant eux-mêmes, mais parce qu’elle réinvestit « des positions de réponses devenues vacantes » dans un système de questionnement où les réponses ne fonctionnent plus 26.
Grâce à Myriam Revault d’Allonnes, nous pouvons donc comprendre ces trois artefacts, le Mayflower, Johnny Appleseed et la cité idéalisée, et plus généralement les artefacts anciens utilisés dans les récits de colonisation spatiale, comme un réinvestissement qui suppose une vacance. A partir de là, en ajoutant la pensée de Myriam Revault d’Allonnes à celle d’Aurélie Villers, on comprend que l’artefact en question, dans son cercle d’origine, pour nous la Terre, ne possède plus sa fonction initiale et que le déplacement de l’artefact, même sécularisé, dans une vacance, la planète à terraformer, puis à coloniser, lui confère une nouvelle sacralité et une signification différente de celle sur la Terre.
Il nous est alors possible, en reprenant Blumenberg, de marquer la différence entre sécularisation et sécularité, « la première désignant seulement le processus par lequel le monde se voit conférer de nouvelles attributions tandis que la seconde renvoie à l’idée d’un monde authentiquement profane27. » Dans nos exemples, la Terre représente cet espace sécularisé n’offrant plus la possibilité d’un sacré 28 tandis que la planète à terraformer représente un espace en cours de sécularisation, par la colonisation, où le sacré peut être rencontré, notamment par la répétition des gestes mythiques et fondateurs.
L’idée d’un processus se dégage et l’on peut associer la terraformation à une sécularisation qui réactive un sacré autorisé par le déplacement. Le paradoxe n’est donc plus paradoxe, mais réinvestissement d’artefacts sécularisés acquérant, grâce à un espace projeté, une nouvelle sacralité par la répétition d’actes fondateurs, comme la colonisation. Néanmoins, et malgré la réduction des paradoxes, utiliser des artefacts anciens pour bâtir un avenir revient, peut-être, à renier cet avenir pour mieux se réapproprier et revivre le passé. Dès lors, la question du futur mêlé au passé apparaît.
Temps et répétition
L’appétence de ces récits pour les artefacts anciens nous amène à nous interroger sur la définition de l’avenir qu’ils supposent, ou peut-être nient, puisque répéter, c’est toujours rejouer, revenir à un temps antérieur avec toute la nostalgie que cela suppose.
Toutefois, en comprenant le réinvestissement des artefacts comme une régénération du sacré, nous pouvons associer ces répétitions non seulement à des gestes historiques, mais aussi à des rituels.
Ainsi, si le rituel s’inscrit dans un temps, il est aussi celui qui, selon Mircea Eliade 29 et Roger Caillois30, sort l’impétrant du temps. Répéter les gestes des premiers colons du Mayflower dépasse le stade de la colonisation pour se fondre dans celui de la cosmogonie. Il ne s’agit plus de répéter l’histoire, sensiblement avec ses mêmes erreurs, mais de recréer le monde avec ce qu’il autorise dans sa virginité car :
En l’occupant [cet espace] et surtout en s’installant, l’homme le transforme symboliquement en Cosmos par une répétition rituelle de la cosmogonie. Ce qui doit devenir « notre monde » doit être préalablement « créé », et toute création a un modèle exemplaire : la Création de l’Univers par les dieux 31.
L’espace mythique, ou la Terre promise, s’incarne dans le satellite Ganymède, avant tout parce qu’il est vierge et qu’il est prêt à attendre des colons. La vacance autorise donc le réinvestissement, ce qui donne sens à la sécularisation, mais surtout conjugue deux temps opposés, un temps historique et héraclitéen 32 qui situe l’action dans une chronologie, et un temps mythique qui sort le personnage qui répète l’acte fondateur du temps héraclitéen pour un supérieur. L’acte colonisateur devient ainsi un acte cosmogonique, ce que renforce le titre du livre dans son antithèse « farmer »/« sky ». Ciel et terre sont liés comme colonisation et cosmogonie 33.
On comprend dès lors que les personnages qui se prêtent à ce rituel acquièrent eux aussi une dimension sacrée, ce qui ne leur ôte pas une dimension matérielle dans la fiction.
Alors les deux temps se confondent, le temps historique et le temps mythique. Le paradoxe s’arrête là. Il ne s’agit pas d’une confrontation des temps, comme entre le passé et l’avenir, mais d’une sublimation du temps, le temps mythique venant, grâce au rituel, sacraliser le temps historique et consacrer les personnages et leurs actes fondateurs.
A partir de là, on comprend que l’utilisation d’artefacts anciens et totalement sécularisés dans la fiction comme, peut-être, parfois, dans la réalité du lecteur (le Mayflower, Johnny Appleseed), a pour conséquence de les sacraliser à nouveau dans la fiction, et, éventuellement dans la réalité, point sur lequel nous reviendrons après, mais aussi d’ajouter une dimension mythique au personnage. Celle-ci est d’ailleurs discutée dans l’extrait ci-dessous :
- Je veux dire, M. Johann Schultz.
- Bien sûr. Bien sûr… Johnny Appleseed. C’est comme ça que tout le monde l’appelle en ville. C’est un idiot. Savez-vous ce qu’il a fait ? Il m’a donné une poignée de pépins de pommes comme s’il m’avait offert les richesses de Salomon.
Je m’arrêtai de ratisser le sol.
- Eh bien, n’est-ce pas le cas ?
Saunders cracha par terre, dans l’espace qui nous séparait :
- C’est un guignol 34.
Cet extrait confond M. Johann Schultz avec Johnny Appleseed et entraîne une double perception, celle positive du personnage narrateur, Bill, et celle, bien plus négative, d’un personnage qui qualifie Schultz-Appleseed d’idiot (nuts). Les visions s’opposent. Pourtant l’on note, dans le discours du personnage à la vision négative, que l’association sacrée se prolonge : Schultz est comparé à Appleseed, lui-même associé à Salomon et à ses richesses. Ce qui différencie alors Bill, le personnage narrateur de l’autre personnage, n’est pas l’histoire qu’ils vivent tous les deux, c’est-à-dire la colonisation de Ganymède, mais la qualité de leur perception du sacré que Caillois définit comme une « catégorie de la sensibilité 35 ». Une séparation s’opère entre les personnages, entre ceux qui perçoivent leur entreprise dans leur dimension historique et sacrée et ceux qui la restreignent à son aspect matérialiste.
La sensibilité au sacré nous permet, avec Julien Ries, de distinguer non pas deux dimensions, mais trois, « la dimension absolue, le divin ; la dimension naturelle de l’objet médiateur ; la dimension de médiation, à savoir l’objet naturel chargé de sacralité 36 ». Cette triple dimension s’incarne à travers Schultz. Il est un simple colon, dimension matérielle ; il incarne Johnny Appleseed, dimension absolue ; il transmet par ses actes et par son être le sacré au monde diégétique, dimension de médiation. Cette triple dimension permet de distinguer les personnages entre ceux qui ne perçoivent que la dimension naturelle des objets ou des gestes et ceux qui ressentent le sacré.
On pourrait alors croire que le sacré de ces nouveaux espaces ainsi que la posture sacerdotale de certains personnages permettraient l’établissement d’un nouvel Eden. Ce serait vite oublier, selon la formule de Roger Caillois, que « le sacré est toujours plus ou moins “ce dont on n’approche pas sans mourir” 37 ».
C’est là qu’apparaît ce qui pourrait être considéré, à première vue, comme une injustice 38. Malgré les nombreux efforts des colons dans Farmer in the Sky, un tremblement de terre détruit la centrale thermique qui les chauffait, et condamne les récoltes. Le rêve d’un monde nouveau vert semble perdu. C’est l’exode vers la ville principale, Léda, et les colons envisagent un retour vers la Terre, c’est-à-dire vers un espace sécularisé, et peut-être plus stable. Néanmoins Bill, peu avant l’embarquement, est pris de dégoût envers certains colons qui, de son point de vue, ne méritaient pas l’expérience de la colonisation. Le tremblement de terre s’interprète alors différemment. Il reste certes pourvoyeur de catastrophes, mais opère aussi une sélection entre ceux qui méritent de rester et ceux qui doivent partir. Bill choisit de demeurer. La colonisation se rapproche ainsi d’une initiation où la planète constitue le grand mystère. D’ailleurs, le roman s’achève par une sorte d’adoubement. Le dernier chapitre s’appelle « Home », signe que Bill a été accepté par la planète. Le personnage principal découvre d’ailleurs un engin spatial extrêmement vieux, construit par une civilisation inconnue et dont Bill hérite pour l’avoir découvert, c’est-à-dire perçu. Ce dernier lui assure richesse et notoriété. Cela signifie aussi et surtout que Bill a été reconnu par les Grands Anciens, les pères de la planète. Il a réussi l’initiation. Il peut coloniser Ganymède.
Cette scène démontre bien que la répétition des actes premiers projette les personnages dans un double temps, un historique et un mythique, et que les deux se conjuguent. La colonisation s’apparente à une initiation où le personnage tient un rôle dans le rituel établi, lequel peut-être particulièrement sévère. Le sacré distingue les personnages entre eux à travers sa perception, mais les invite aussi à un acte politique, grâce à la nostalgie pastorale selon Chris Pak. Dès lors, la colonisation ne se réduit pas, ce qui serait déjà beaucoup, à une expérience du sacré ; elle exige aussi du personnage un positionnement politique que nous nous proposons d’étudier.
Idéal et décision politique
S’implanter sur une nouvelle planète amène les personnages à la répétition rituelle des gestes fondateurs et au réinvestissement d’artefacts anciens dans ces espaces, souvent hostiles, mais aussi pleins de promesses ; la Terre, dans les deux récits, n’en apporte plus aucune. Néanmoins, à la confrontation avec la vacance du nouvel espace se mêle une nostalgie pastorale qui contraint le personnage à un positionnement politique, à partir du moment où celui-ci perçoit le sacré et comprend que répétition n’est pas nécessairement imitation. Cette distinction le prévient d’un certain fatalisme où son libre arbitre serait nié au profit d’un dictat divin contre lequel il ne pourrait rien. Dès lors, un regard critique, pour lui comme pour le lecteur, est requis ; en ce sens, les visées différentes de Farmer in the Sky et The Martian Chronicles sont intéressantes, ne serait-ce que dans leurs formes39. Tandis que Farmer in the Sky propose une vision plutôt positive de la colonisation de la planète extraterrestre, certes exigeante en sacrifices, The Martian Chronicles dans ses différentes nouvelles en livre une davantage mitigée et, à cet effet, « And The Moon Be Still As Bright » est édifiante. Nous y observerons le positionnement politique des personnages.
La quatrième expédition est arrivée sur Mars. Les trois premières ont échoué. Lorsqu’ils arrivent, les explorateurs sont face à une civilisation éteinte. Ils distinguent, d’une part, d’anciennes civilisations mortes depuis des éons ; d’autre part, une civilisation encore vivante quelques semaines auparavant. La cause de cette disparition est rapidement identifiée : la varicelle. Dès lors, les personnages sont pris dans la répétition historique.
Mars est décrite comme un mausolée et les explorateurs, bien loin de la joie d’atterrir vivants sur Mars, sont peinés, hormis Biggs qui insiste pour fêter leur arrivée. Wilder, le capitaine, n’approuve pas, mais comprend la nécessité de la cérémonie. Spender, l’archéologue et personnage principal, se révolte et frappe Biggs.
Un conflit de perception s’installe entre la plupart des membres qui exécutent leur mission sans se soucier de la civilisation martienne, et Spender qui se plonge dans sa compréhension. Les uns regardent le futur, l’autre se perd dans le passé.
Dans la perception de Spender, les explorateurs agissent comme des profanateurs. Il quitte le groupe pour explorer la civilisation martienne. Il apprend leur écriture et prétend même en avoir rencontré un, l’avoir approché, un peu plus chaque jour, jusqu’au moment où ils se sont confondus. Il déclare même « I'm the last Martian 40 » et commence à exécuter les membres de l’équipage. Il propose cependant au personnage de Cheroke, descendant des natifs-américains comme son nom l’indique, de l’accompagner dans sa lutte. Cheroke refuse ; il est exécuté. Le choix politique des deux personnages est ici à souligner.
Spender est celui qui perçoit la sacralité du rituel, mais qui refuse, pris dans la répétition de l’histoire, l’imitation. Cheroke incarne le personnage qui peut et doit percevoir, grâce à son héritage, la sacralité de la civilisation martienne, et donc de la colonisation, mais qui les nie au profit d’un travail sécularisé : permettre l’implantation de colons. Il sait la répétition de l’histoire ; il accepte son imitation. La nuance est subtile ; elle est d’importance, notamment aux yeux de Spender, qui le condamne. Par sa rencontre avec le nouvel espace, Spender a immédiatement pressenti le sacré et ses conséquences. Dans une moindre mesure, le capitaine Wilder aussi. Biggs est celui qui ne ressent rien. Cheroke est celui qui le devrait. On remarque alors trois types de personnages, ceux comme Biggs, totalement profanes, qui ne perçoivent pas la dimension sacrée de l’histoire, ceux comme Spender qui ont développé, par exemple grâce au travail, une « catégorie de la sensibilité 41 », pour reprendre l’expression de Roger Caillois et qui appréhendent cette dimension, et ceux comme Cheroke qui, quoique sensibles à cette dimension, la refusent. Si Biggs est exécuté par Spender pour son manque de perception, ce qui en fait un personnage grossier, Cheroke l’est, toujours par Spender, pour son reniement. Il sait le sacré de l’histoire et sa répétition et accepte son imitation. Spender, lui, s’oppose à cette imitation.
Si l’on compare cette nouvelle à Farmer in the Sky, on remarque aisément que les positionnements politiques des personnages sont opposés.
Peu à peu, Bill, le personnage de Robert Heinlein comprend la sacralité de sa tâche et donne davantage de sens au Mayflower qui le porte jusqu’à Ganymède et à sa rencontre avec un nouveau Johnny Appleseed. La catastrophe opère définitivement comme « un opérateur de vérité 42 » grâce à laquelle Bill comprend son rôle, ce qui permet de le détacher de ceux qui ne le comprennent pas et qui repartent sur Terre, c’est-à-dire vers l’espace déjà sécularisé. La tâche de Bill devient définitivement sacrée, ce que renforce « l’adoubement » par la découverte de l’artefact ancien, et il rejoue sur Ganymède l’histoire des Etats-Unis. La répétition se double, dans ce cas précis, d’une imitation : imiter les grands colons d’autrefois, c’est sacraliser son geste, l’humanité, et l’histoire des Etats-Unis, du moins dans la diégèse.
C’est à cette étape que les deux productions disjoignent, notamment par le recours à un jugement tiers, celui du lecteur. Alors que Spender, par la répétition, refuse l’imitation, Bill la réactive. Dès lors, c’est l’enjeu de ce qui doit être sacré qui est discuté, soit, pour Spender, la civilisation disparue, celle des Martiens, pour Bill, la colonisation. Au lecteur d’interpréter le phénomène de la colonisation dans sa dimension sacrée, notamment par la refiguration ricoeurienne 43, laquelle varie grandement entre les deux ouvrages, en premier lieu parce que The Martian Chronicles propose une colonisation qui « recouvre » une civilisation, alors que Farmer in the Sky en décrit une sur un territoire quasiment vierge, effaçant, lors de la phase de refiguration, la présence des natifs-américains, ce que le lecteur peut réintroduire. En réinvestissant la fiction dans la réalité, le lecteur peut choisir de souscrire à la vision de Bill ou à celle de Spender, voire au deux, en comprenant la colonisation ou le devoir de mémoire envers les peuples autochtones comme sacré, et même en attachant aux deux une dimension autre qu’un pragmatisme primaire. Mais cette sacralisation n’est pas innocente et suppose, de la part du lecteur, un positionnement politique. Apprécier le roman de Robert Heinlein, pour ses différentes qualités, ne suppose pas une nécessaire adhésion à la vision d’une colonisation sacrée pas plus que les nouvelles de Ray Bradbury ne suggèrent une dénonciation active, de la part du lecteur, de la colonisation. Néanmoins, par la sacralisation diégétique permise par la fiction, le lecteur est appelé à repenser l’histoire, à la com-prendre, c’est-à-dire à la prendre avec lui-même, et à adhérer ou non, selon l’époque à laquelle il vit et reçoit le texte, avec le discours social de son époque sur les différents événements sacralisés.
Ainsi, l’utilisation d’artefacts anciens dans de nouveaux espaces, celui des mondes imaginaires, a permis quelque chose que, peut-être, ne permet pas une simple connaissance scientifique de l’histoire de l’humanité : une nouvelle sacralisation d’artefacts sécularisés. Certes, le roman est soumis à l’immersion fictionnelle de Jean-Marie Schaeffer 44 et ne confond pas le fictionnel et la réalité, néanmoins, par la sécularisation permise par le nouvel espace, même lorsque les artefacts sont démontés et remontés (ce qu’opère la refiguration ricoeurienne) par le lecteur pour parvenir dans la réalité, une forme de sacré demeure et interroge, peut-être, sur ce qui doit être sacré et sur ce qui ne l’est pas.
Conclusion
Nous avons pu observer que la colonisation s’apparentait à un processus proche de la sécularisation qui nous permettait de comprendre les paradoxes apparents non plus comme des paradoxes, mais comme le réinvestissement d’artefacts totalement sécularisés, dans un espace qui l’est tout autant, la Terre, vers un espace en cours de sécularisation, proposant une certaine vacance, et donc une certaine sacralité. Par le déplacement, le sacré est réactivé.
Celui-ci nous autorise à relire les récits de colonisation spatiale comme un rituel, résolvant le paradoxe du passé dans le futur, où le personnage peut développer une posture sacerdotale, ce qui accroît sa sensibilité au sacré et lui confère une mission qui dépasse le cadre de la matérialité diégétique.
Néanmoins, l’acquisition de cette posture n’est pas gratuite et exige un positionnement politique dans le présent fictionnel comme par rapport à l’histoire qu’il porte en lui. C’est pourquoi Bill sacralise la colonisation, présente (dans la fiction) comme passée, et que Spender la critique au profit d’une tâche qu’il juge plus noble, la sacralisation de la mémoire du peuple conquis. À partir de là, un positionnement, qui déborde le cadre de la fiction, est exigé : celui de penser l’histoire comme une répétition ou une imitation.
Si ce processus apparaît dans nos deux exemples, des récits de terraformation où la colonisation est interrogée, il convient de comprendre que les mondes imaginaires proposent une sacralisation qui place le récepteur dans une posture différente et active.
Celle-ci se retrouve particulièrement dans les jeux, qui sont nombreux à proposer, de manières différentes, cet acte cosmogonique de la colonisation. Dans Mass Effect Andromeda 45, le joueur incarne le « Pionnier », celui qui doit permettre aux peuples de s’installer dans une nouvelle galaxie. Les célèbres jeux de stratégie Civilization 46 rejouent l’histoire des conquêtes humaines. Endless Legend 47 propose un schéma proche, mais dans des mondes de fantasy. Stellaris 48 offre la conquête de l’espace. Terraforming Mars 49, un des jeux de plateau les mieux vendus, contient son ambition dans son nom. Underwater Cities 50 invite le joueur à construire, sur une terre en péril, un « avenir sous les vagues », ainsi qu’il est écrit sur la boîte. Welcome 51 place le joueur dans le rôle d’un architecte des années 50 aux Etats-Unis, etc. Tous ces jeux offrent un espace nouveau ainsi qu’une expérience presque démiurgique au joueur à travers la colonisation et, parfois, la terraformation. Si la première, comme dans nos deux récits, permet de rejouer l’histoire et les actes fondateurs, la seconde autorise la création du théâtre où se dérouleront ces actes. En concevant et/ou modifiant une carte, pour les jeux, en créant un espace viable pour les personnages, dans le cas du roman, la terraformation souligne encore davantage son rapport au sacré et la posture qu’elle offre aux personnages ou au joueur. Bien sûr, cette expérience, de la colonisation ou de la terraformation, s’arrête lorsque le jeu s’achève, lorsque l’immersion fictionnelle n’est plus active. Néanmoins, par l’expérience ludique 52, le jeu produit un « jeu », c’est-à-dire un écart qui permet au joueur de reproduire des actes du passé en y conjuguant une réflexion politique visible à travers ses choix. Une fois la partie terminée, les choix demeurent dans le jeu, mais la réflexion se poursuit et invite le récepteur à les penser et les repenser en pesant leurs résonnances politiques et historiques. Les espaces nouveaux, s’ils peuvent apparaître comme redondants, autorisent ainsi une expérience unique : celle de repenser l’histoire et la politique.
- J.R.R. Tolkien, The Lord of the Rings, Londres, HarperCollinsPublishers, 1993 [1954-5].
- Isaac Asimov, Foundation Trilogy, New York, Everyman’s Library, 2010 [1951].
- Terry Pratchett, The Colour of Magic, London, Corgi Books, 1985 [1983].
- Edgar Rice Burroughs, Stories of Mars, Gateway, « Golden Age Masterworks », 2022 [1912].
- Pamela Sergent, Venus of Dreams, New York, Open Road Integrated Media, 2014 [1986].
- Anne McCaffrey, Dragonflight, Dragonriders of Pern, New York, Ballantine Books, 1968.
- Marion Zimmer Bradley, Darkover Landfall, New York, Daw Books, 1972.
- Charles Ridoux, Tolkien – Le Chant du monde, Paris, Les Belles Lettres, Encrage, 2004, p. 235-248.
- Terry Pratchett, Going Postal, Londres, Corgi Books, 2005 [2004].
- Terry Pratchett, Moving Pictures, Londres, Corgi Books, 1991 [1990].
- Terry Pratchett, The Last Continent, Londres, Doubleday, 1998.
- Terry Pratchett, Raising Steam, Londres, Doubleday, 2013.
- « The sentimental pastoral ideal encompasses specific instances of landscaping and sublimation that generate pastoral nostalgia, which could be taken as a direct guide to political action ». Chris Pak, Terraforming – Ecopolitical Transformations and Environmentalism in Science Fiction, Liverpool Science Fiction Texts and Studies 55, Liverpool, Liverpool University Press, 2016, p.58.
- « The potential transformation of these wildernesses into agricultural land or Edenic gardens ». Ibid., p.60.
- Ray Bradbury, The Martian Chronicles, New York, Double Day, 1950.
- Robert Heinlein, Farmer in the Sky [version numérique], New York, Del Rey, 1992 [1950].
- The Martian Chronicles est un fix-up, c’est-à-dire la réunion de nouvelles éparses formant néanmoins une unité sémantique dans un recueil organisé. « The Green Morning » est l’une de ces nouvelles. Pour The Martian Chronicles, les nouvelles s’échelonnent de 1946 à 1950.
- Aurélie Villers, « Du mystère à la terraformation : petit précis de mythologie martienne », p. 101-115, in Francis Berthelot, Philippe Clermont (dir.), Colloque de Cerisy, science-fiction et imaginaires contemporains, Paris, Bragelonne, 2007, p. 107.
- Il est tout à fait possible que le glissement d’objets historiques vers le mythe passe par la pop culture. Voir Roland Barthes, Mythologies, Paris, Seuil, Points, 1970 [1957] ; Marcel Danesi, Popular Culture – Introductory perspectives, Lanham, Maryland, Rowman & Littlefield, 4ème édition, 2019 [2012].
- Ibid., p. 107.
- Mircea Eliade, La Nostalgie des origines, Paris, Gallimard, « Folios Essais », 1971 [1969], 159/389.
- Pierre Brunel, Mythopoétique des genres, Paris, PUF, « Écriture », 2003, p.182-3.
- Roger Caillois, L’Homme et le sacré, Paris, Gallimard, « Folio Essais », 2008 [1950].
- Marcel Danesi, X-rated! The Power of Myth Symbolism in Popular Culture, New York, Palgrave Macmillan, 2009, p. 14.
- « La sécularisation : “Action de transférer un bien d’Église dans le domaine public. – Action de soustraire une fonction, une institution sociale à la domination, à l’influence religieuse, ecclésiastique, de (la) mettre entre les mains des laïcs, des pouvoirs publics. – Action de donner à quelque chose un caractère laïc, non religieux, non sacré.” ». Michaël Foessel, Jean-François Kervégan, Myriam Revault d’Allonnes (dir.), Modernité et sécularisation - Hans Blumenberg, Karl Löwith, Carl Schmitt, Leo Strauss, Paris, CNRS Éditions, Nouvelle édition [en ligne], 2007 (généré le 04 mai 2019), 2.9/405.
- Myriam Revault d’Allonnes, « Ce que disent les modernes. « Sécularité » ou « sécularisation » ? », 94.3-121.6/405, in Michaël Foessel, Jean-François Kervégan, Myriam Revault d’Allonnes (dir.), Modernité et sécularisation - Hans Blumenberg, Karl Löwith, Carl Schmitt, Leo Strauss, op.cit., 104/405
- Ibid., 57/405.
- Dans cette hypothèse, les récits de terraformation opposent donc deux espaces. Le premier, la Terre, est un espace sans vacance où toutes les questions ont reçu des réponses, sinon satisfaisantes, au moins qui remplissent la vacance. Au contraire, la planète à terraformer propose de nombreuses vacances dont une des plus évidentes est : comment vivre dans ce milieu hostile ? Le roman peut donc y répondre en réinvestissant les artefacts sécularisés de la Terre.
- Mircea Eliade, Initiations, rites, sociétés secrètes, Paris, Gallimard, « Folio Essais », 2008 [1959].
- Roger Caillois, L’Homme et le sacré, op.cit.
- Mircea Eliade, Le Sacré et le profane, Paris, Gallimard, « Folio Essais », 1988 [1954], 33/269.
- Le temps héraclitéen s’oppose, dans notre étude, au temps mythique. Il se définit comme un temps décrivant une histoire par la succession d’événements qui se répondent et s’enchaînent, même lorsque, dans la narration, ces événements ne se succèdent pas, comme, parfois, dans les romans policiers. Le temps héraclitéen permet au lecteur d’établir une histoire où l’événement A précède l’événement B, qui précède l’événement C, etc. Il se distingue de manière subtile du temps historique qui, dans notre étude, constitue le temps de la narration de ces événements, mais englobe aussi un temps extérieur à celui de la fiction par les références au Mayflower et à Johnny Appleseed. Ainsi, le temps historique peut, en quelque sorte, se répéter, comme avec les deux Mayflower, celui de 1620 et celui de Farmer in the Sky. Le temps héraclitéen les distingue.
- L’aspect cosmogonique se retrouve dans la nouvelle « Green Morning », que nous avons déjà évoquée. Le sacré embrasse le réel, notamment par l’évocation de Johnny Appleseed, et la répétition du Grand Ancêtre. Le mot « Morning » est lui-même à comprendre dans sa dimension cosmogonique, comme un renouveau, la fin d’un monde pour la naissance d’un autre.
- « “I mean Mr. Johann Schultz.”
- Roger Caillois, L’Homme et le sacré, op.cit., p.24.
- Julien Ries, L’Homme et le sacré, Paris, Editions du Cerf, 2009, p.27.
- Roger Caillois, L’Homme et le sacré, op.cit., p.24.
- Voir notre article : Mathieu Lottiaux, « La Carte dans les littératures de l’imaginaire : un dialogue entre écologie et géographie », p.175-184, in Dorota Chlanda, Malgorzata Kamecka, Malgorzata Zawadzka (dir.), La Littérature et la carte géographique, Bialystok, Uniwersytet w Bialymstoku, 2022.
- Tout d’abord le terme « Chronicles » attache les nouvelles du fix-up à l’histoire et au temps. Néanmoins l’étymologie du terme, dans sa double acceptation, nourrit une nouvelle fois les ambiguïtés. « Chronicles » est à rattacher à « Chronos », le temps, le temps historique, et semble s’opposer au mythe. Mais « Chronos » appelle aussi le dieu Saturne, le dispensateur de l’Âge d’Or de la mythologie, âge terrible et capable de tous les excès comme l’a étudié Roger Caillois : « On comprend que le temps mythique apparaisse revêtu d’une ambiguïté fondamentale : de fait, il se présente sous les aspects antithétiques du Chaos et de l’Âge d’Or. […] C’est le règne de Saturne ou de Cronos, sans guerre et sans commerce, sans esclavage ni propriété privée. Mais ce monde de lumière, de joie paisible, de vie facile et heureuse est en même temps un monde de ténèbres et d’horreur. Le temps de Saturne et celui des sacrifices humains et Cronos dévorait ses enfants. La fertilité spontanée du sol n’est pas elle-même sans revers. Le premier âge se présente aussi comme l’ère des créations exubérantes et désordonnées, des enfantements monstrueux et excessifs ». (Caillois, Roger, L’Homme et le sacré, op.cit., pp.139-40).
- Ray Bradbury, The Martian Chronicles, op.cit., 98/305.
- Roger Caillois, L’Homme et le sacré, op.cit., p. 25.
- Jean-Paul Engélibert, Apocalypses sans royaume, Politique des fictions de la fin du monde, XXe-XXIe siècles, Paris, Classiques Garnier, 2013, p.181. L’ouvrage de Jean-Paul Engélibert est très complémentaire à notre étude et montre bien comment la catastrophe, pour lui dans les récits post-apocalyptiques, influe sur les personnages et leur devenir.
- Paul Ricoeur, Temps et Récit, 1 – L’intrigue et le récit historique, Paris, Le Seuil, 1983.
- Jean-Marie Schaeffer, Pourquoi la fiction ?, Paris, Seuil, 1999.
- Ian Frazier, Mass Effect Andromeda, © Bioware, 2017.
- Sid Meier, Bruce Shelley, Civilization, © MicroProse, 1991.
- Endless Legend, © Amplitude Studios © Sega, 2014.
- Johan Andersson, Stellaris, © Paradox Development Studio, 2016.
- Jacob Fryxelius, Terraforming Mars, © FryxGames, 2016.
- Vladimir Suchy, Underwater Cities, © Delicious Games, 2018.
- Benoit Turpin, Welcome, © Bleu Cocker Games, 2018.
- Nous souscrivons aux théories de l’expérience de jeu développées par Mathieu Triclot dans Philosophie des jeux vidéo, sans pour autant renier les approches ludologiques ou narratives (Mathieu Triclot, Philosophie des jeux vidéo, Paris, La Découverte, « Poches / Sciences humaines et sociales », 2017 [2011]).