« Ce visage de neige et de solitude...» Les vampires de <em>Twilight</em>, nouveaux sphinx des glaces ?

« Ce visage de neige et de solitude...» Les vampires de Twilight, nouveaux sphinx des glaces ?

Par CASTA Isabelle-Rachel
Illustration : Galliane Flamant

A Jacques Sirgent

 

Le 4 août 2020 a été à n'en pas douter une grande date – en termes de marketing et d'œuvre- monde : le cinquième volume de Twilight, Midnight Sun, sortit (enfin ? en fin ?). Se posera inévitablement la question du choix des interprètes – quand sonnera l'heure de la mise en images... or, si les vampires ne vieillissent jamais (au sens humain...), les acteurs, eux, oui. Et tout le make-up de la terre ne ramènera jamais les comédiens originaux à leur vénusté d'il y a 15 ans – lors même que Robert Pattinson, à la fin de la pentalogie filmique, avouait déjà devoir être fardé plus drastiquement qu'au début, pour cacher ses propres premières rides (en 2012, il avait 26 ans – on peut dire que le malheur ne devait pas être immense). Mais c'est d'entrée de jeu évoquer les termes de la problématique liée à la représentation vampirique – autrement dit aux codes élus pour signaler la présence d'une créature non-référencée dans nos realia 2, et par là même entièrement dépendante des choix iconiques des réalisateurs.

 

S'il est bien certain que Roland Barthes n'a jamais songé aux vampires de Twilight en décrivant le beau visage de Garbo dans La Reine Christine, il serait certainement sensible au « make-up » spectral qui signale le clan Cullen aux yeux de tous – tous, qui bien entendu ne « voient » rien, si ce n'est le miroitement incongru des peaux endiamantées exposées au soleil... puisque tel est le sort, pour Stephenie Meyer et pour ses cinéastes, des vampires de Forks ; blancs comme la craie, les visages où le sang ne circule plus ont à la fois la lividité du cadavre (mais un cadavre « joli », on n'est pas à Zombieland !) et l'éclat velouté du marbre, statufiés qu'ils sont dans l'interprétation hiératique et brumeuse demandée par les successifs réalisateurs. Les membres du clan d'Olympic se couvrent ainsi d'un féerique fard blanc, plus ou moins épais de tournage en tournage, signalant la « non-vie » de cette chimère ambulante ; pourtant, les vampires « noirs » restent bel et bien noirs, sans lividité particulière, comme s'il fallait qu'un vampire caucasien devienne plus blanc que blanc pour signifier son état de mort-vivant, sans que cela affecte ses frères vampires d'une autre ethnie. Ce sont là des choix picturaux et filmiques qui peuvent être scrutés : « Et pourtant, ces cinq-là se ressemblaient de façon frappante. Ils étaient d'une pâleur de craie, plus diaphanes que n’importe quel ado, habitant cette ville privée de soleil, plus clairs que moi l’albinos. » (Fascination 30) 3.

 

Comme nous invitent à le constater tant Jean-Marie Schaeffer dans Pourquoi la fiction ? que Gérard Genette dans Seuils, la légitimité générique d’une œuvre – ici cinématographique - émane d’une collection variable de signes (graphiques, picturaux, éditoriaux, auctoriaux…) qui informent le récepteur/spectateur sur ce qui l'attend et impliquent de la part de l'auteur/réalisateur le respect d'un code ; un contrat, auquel contribue le paratexte, « zone non seulement de transition mais de transaction » (Genette 8), et qui produit une conduite spectatorielle. Une mention générique peut donc avoir un effet modélisant sur les œuvres à venir, garantir une unité thématique, une harmonie générale tout en permettant un changement progressif de tonalité. La réception enregistrera à la fois cette continuité et ces nuances… Pour l'adaptation d'un best-seller « cross-age » comme la saga Twilight (Stephenie Meyer), l’appartenance (ou l’inappartenance) générique s’actualise d’abord visuellement, puisque c’est le premier aspect que conçoit notre polysensorialité : les « couvertures », les affiches (de livres, dans un premier temps, puis des DVD) disent-elles quelque chose du classement de l’œuvre ? Sans doute, car s’y conjuguent à la fois les marqueurs symboliques (une rose, un ruban), sexuels (la dame du jeu d’échec, la plume souillée) et enfin générationnels (le lettrage gothique des titres). Les illustrations fonctionnent généralement en reflet ou en symptôme du contenu ; ici, elles obéissent davantage à la stratégie du symptôme, puisqu’elles sont au croisement d’une somme formidable de contraintes et d’intérêts : elles portent au rêve éveillé, elles ouvrent les portes de l’interprétation flottante, de l’herméneutique ; ce qu’elles communiquent reste non-clair, et touche à l’intime subjectivité.

 

Nous ne nous interdirons pas pour autant le détour éclairant vers d’autres séries, d’autres images pour d’autres installations imag(in)eantes, bien sûr toujours asymptotiques ; car le fétichisme oblitérant de la blancheur vampirique en chick-lit/bit-lit peut-il commander l’imagerie ? Le maquillage, au contraire, conditionne-t-il le genre, en s’imposant comme intermédialité opérative ? Ce sera là le biais majeur de notre questionnement. Nous nous proposons donc de détailler ces quelques remarques autour de trois grands items : nous interrogerons d'abord le sème de la blancheur, comme marqueur anémiant ; puis nous scruterons la typologie classique de la représentation des morts-vivants, avant de nous tourner vers le besoin de réenchantement sanglant, maître des codes de l'imaginaire d'horreur.

 

De l'image fixée à l'image animée... : la blancheur, marqueur anémiant

Ses bras de glace se resserrent autour de moi, ses lèves frôlèrent mon oreille, son haleine gelée provoqua mes frissons. (Hésitation 439)

 

Redisons-le : avant les films, les couvertures des ouvrages donnèrent la palette et la tonalité « tragiques », aux dominantes noire, blanche et rouge, amenant tous les regards à isoler la carnation d'albâtre des « héros » par de multiples éléments de contraste : ruban à demi-déchiré, plume/fleur trempée de sang, pomme bibliquement offerte par on ne sait quelle main tentatrice… pour distribuer une mythologie « mainstream » 4 et servir de liage cataphorique avec le contenu à venir – au-delà de cette magique « une » qui, si l’on sait la lire, chiffre merveilleusement et dit, à la fois transparente et opaque, le destin de Bella/Juliette en marche vers l’au-delà.

 

Notre clavier iconique intérieur – pour reprendre sans y insister les thèses de l’école de Constance – nous informe du contraste saisissant entre, d’une part, la blancheur excessive des bras, et, d’autre part, la tentation que le fruit, rond et coloré, doit suggérer pour un vampire, si tant est que la transposition avec le corps appétissant de l’héroïne Bella Swan, soit réalisée ; elle est semblable à ce fruit gorgé de vie et de promesse, déjà soumis à la menace que le titre, par le « l » de Twilight démesurément allongé et aiguisé, fait peser sur elle ; mais à front renversé, nous pouvons décoder aussi cette pomme comme l’analogon de la connaissance ultime, offerte par le monde vampirique à l’enfant encore humaine : la coupe de l’immortalité à laquelle elle devra boire, ou renoncer. Or l’horizon de réception du cœur de cible (adolescents et jeunes adultes, massivement féminins de toute façon), est particulièrement sensible à l'ensemble des hypothèses visuelles partagées, ce qui amène de la part des concepteurs une prise en compte accrue des effets à produire (Wirkung) : « Ce mélange des genres, consubstantiel du mythe contemporain du vampire, révèle la marque du fantastique, art bigarré, fiché entre le grotesque chanté par Poe, le tragique issu de l’antiquité, et le sublime qui, par définition, confine au divin, entre terreur et fascination, superstition et religion, surnaturel et préternaturel. » (Guérin 990). Par comparaison, la grande fixité des jaquettes de DVD mime les génériques des séries télévisées qui rassemblent les personnages dans une sorte de précipité de leurs postures et activités principales ; souvent tournés vers nous mais en point de fuite, les héros nous convient tacitement à venir les rejoindre, installés dans une anaphore résomptive des situations réciproques : ni réalistes, ni abstraites, ces imageries puisent leur efficace dans l’engouement planétaire pour le casting – qui a donc remplacé l’impersonnalité des premières couvertures. A l’arrière-plan, on distingue, comme par une sorte de bande-annonce fixée dans l’espace, les autres protagonistes mineurs, et quelques-uns des « moments forts » ; cela permet de re-géométriser la fluidité ténébreuse des « fonds », propices à nimber toujours davantage la carnation de porcelaine des buveurs de sang, blancs comme Jadis, la sorcière blanche de Narnia :

 

Dans son visage couleur de glace, ses prunelles avaient l’air argentées […] sa peau fraiche constituait l’antidote idéal à l’incendie. Être allongé sur sa poitrine glacée, ses bras autour de moi, paraissait facile et naturel. » (Révélation 100-101).

 

Tout se passe comme si, loin de rompre avec la tradition ou les préoccupations esthétiques « sérieuses », l’irruption des littératures de l’imaginaire – dont Twilight est la parabole parfaite – confortait en quelque sorte les recherches de l’ensemble des écrivains et des critiques de ce début du 21ème siècle ; il s'agit là d'œuvres migrantes 5 : l’adaptation filmique, et ses propres codes de distributions (affiches, teaser, promotion, publicités), introduit de fait un recentrement fréquent sur des visages et des silhouettes d’acteurs, qui met fin à l’indécision des symboles de couverture livresque et assume désormais, à lui seul, l’engouement auparavant distribué sur autant de supports fantasmatiques que de lecteurs ; de pluribus unus ! Dans Twilight, les couvertures, les affiches (du film), puis les jaquettes (des DVD) n’obéissent certes pas tout à fait aux mêmes logiques, mais seront vues, et adoubées, par les mêmes personnes.

 

Il est vrai qu’on souligne souvent la « bassesse » des objets et la « hauteur » du sujet, mais ici les deux choix excipent d’une même pertinence : agencer l’innommable, ou plutôt l’in-nommé ; le cœur de cible de Twilight, plus féminin que masculin, reçoit comme les pièces d’un puzzle à interpréter et à reconstituer les messages successifs des compositions de couvertures : le ruban déchiqueté, encore lui, renvoie à tout un engramme inépuisable de perte, de rupture, d’attachement délié et dénoué, et rejoint par syllepse herméneutique, la « cruche cassée 6 » de Greuze (un peu moins celle de Kleist 7), ou les allusions grivoises de Beaumarchais dans Le Mariage… : « tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle… s’emplit. »

 

Les quatre tableaux formant couverture ont été immédiatement adoubés par une communauté lectante, partageant une poéticité élémentaire mais efficace ; voici d’ailleurs ce qu’en dit textuellement l’auteur, Stephenie Meyer : « Le pomme sur la couverture de Fascination est à la fois le symbole du fruit défendu et le symbole du choix, le ruban d’Hésitation représente l’impossibilité de laisser son passé derrière soi, et la couverture de Révélation symbolise l’évolution de Bella dans la série 8 » ; on apprend incidemment que le troisième visuel a été réalisé sans l’avis de l’auteure, ce qui ne l’invalide en rien, d’ailleurs. La nouvelle dérivée d’Eclipse, L’appel du sang (titre à l’explicite agressif, nullement contenu dans l’original, plus « soft » et plus mystérieux : The short second life of Bree Tanner) s’orne d’ailleurs d’un sablier au sable rouge, parfaite transition entre le temps humain, mesuré et compté, et l’éternité vampirique – qui immobilise les lignes et fige le présent en destin. Le figement des corps et des affects (« blanc » comme un mariage blanc) tisse ainsi une érotique de la déprise, de l'étrange, de la frigorification incongrue des élans et des étreintes : « Il posa ses lèves de givre aux contours irréprochables sur ma joue détruite. » (Tentation 16).

 

L’examen de ces images 9 – qui dialoguent entre elles autant qu’avec la diégèse précise de chaque chapitre – confrontées aux visualités élues pour les adaptations cinématographiques, nous amène ainsi à un constat liminaire limpide : l’esthétique des affiches de films (et des DVD après eux) substitue les visages des acteurs 10 aux figures allégoriques des ouvrages, recourant ainsi à un tout autre clavier iconique et chromatique ; ce « troisième » dialogue informe et nourrit, rétroactivement, les résonances énigmatiques de la tétralogie ; précisons encore que la traduction française de la suite titulaire est assez distante des sèmes originaux, provoquant par là-même un effet supplémentaire d’incommensurabilité paradigmatique ; en effet, « Twilight » (en français « la saga du désir interdit », traduction de fait réservée au Canada francophone) se décline en Fascination, Tentation, Hésitation, et Révélation – ce qui transcrit de façon lointaine et allusive les originaux fondés sur la métaphore filée d’une nocturne : Twilight (Fascination), New Moon (Tentation), Eclipse (Hésitation) et Breaking Dawn (Révélation).

 

Le titre du premier volume le plus communément reçu, Twilight, est devenu de fait le titre général de l’œuvre ; il donne la caractéristique crépusculaire du propos, le « clair-obscur » des commencements cédant à la « nouvelle lune », puis à l’obscurité relative de l’éclipse, avant de s’exaucer en aurore prometteuse mais pleine de péril, renaissance de souffrance et de splendeur pour celle qui, comme Aragorn, a marché aux pays des morts, ou plutôt dans les pas du dieu Apollon : « […] L’Apollon qui, maintenant, s’intéressait à son plateau, réduisait en charpie un beignet avec ses longs doigts pâles. » (Fascination 31).

 

La suspicion d'appropriation culturelle amène, certes, bon nombre d'artistes et d 'écrivains à censurer leur présentation de groupes minorés ou racisés, et en particuliers les indiens 11 d'Amérique ; cependant le personnage de Jacob Black – tritagoniste essentiel des romans et des films - contient déjà dans son nom même son opposition à la fois chromatique et essentialisée aux blancs vampires de la famille d'Edward ; il forme la tribu Quileute avec tous les siens (Sam Uley, Paul, Jared, Ambry Call, Quil Ateara, Leah, Seth et Emily) : leur fantasmagorique transformation en loup-garou met également en avant et en lumière la fonction animalisante qui, par son instinct de vie surdimensionné et surdéveloppé, s'oppose terme à terme à la pulsion de mort (thanatos) incarnée ici par les vampires, à la pâleur asymptotique à celle des cadavres.

 

Les tonalités cuivrées du teint des Quileute peut donc exciper à deux réseaux de signifiance : d'abord l'appartenance ethnique aux tribus ancestrales de l'Amérique, mais aussi le devenir loup qui, on s'en souvient, est l'une des formes d'Apollon, dieu du soleil. Au minuit perpétuel qu'incarnent les vampires glacés et livides, Jacob et les siens apportent donc le démenti permanent d'une chaleur et d'une surabondance de vie, dont le maquillage ambré et bronzé témoigne puissamment - assez en tout cas pour réarmer l'oscillation affective de Bella entre l'amour viscéral de la vie, et l'élan irrépressible vers le néant, fût-il séduisant comme « Edward appuyé contre son étincelante Volvo gris argent, immobile, hommage marmoréen rendu à quelque dieu païen de la beauté désormais oublié. » (Tentation 17).

 

Généralement, si l'affiche fonctionne en  inscription légitimante d'un produit stabilisé, pour l’insertion de cet objet filmique dans un univers tissé d'autres images, c'est que les paramètres qui constituent cette scénographie relèvent autant du rituel des genres (codifié) que de la position supposée de l'énonciateur/réalisateur et du co-énonciateur (le spectateur), par rapport aux discours tenus, dans la société, sur la catégorie en question ; les représentations vampiriques n’émargent donc pas toutes au même régime, ni sémiologique, ni référentiel. C'est pourquoi l'on peut supposer que les jaquettes de DVD, comme les affiches publicitaires, forment des loci de transition entre la fixité des couvertures du livre et l'animation des films ; il s'agit donc d'accentuer les caractères des uns et des autres, et de souligner encore une fois le contraste de carnation entre les Volturi (Aro, Caïus, Marcus, Sulpicia, Athenodora, puis Jane, Chelsea, Alec, Demetri, Felix...) et les personnages encore humains. Les aînés de ce clan ressemblent à de vieilles poupées trop fardées, exactement comme le meneur de jeu du film Cabaret (Joël Grey) ; ce fard accentue d'ailleurs l'effroi qu'ils inspirent, car ils sont d'une férocité absolue malgré la joliesse affectée de leurs traits délicats ; on pourrait aussi penser au personnage balzacien de Zambinella, le castrat de la nouvelle Sarrasine, castrat devenu un vieillard outrageusement maquillé, hantant les salons de la Restauration au bras d'une jeune et éblouissante beauté...

 

C'est particulièrement remarquable dans la scène finale du chapitre V (Révélation, deuxième partie) qui montre le conflit épique entre d'une part les Cullen et leurs alliés, et d'autre part les Volturi et leurs obligés. Le cadre neigeux dans lequel se déroule cette ultime bataille 12 accentue et dramatise encore les maquillages théâtraux et les postures presque dignes de la gestuelle kabuki, tant la fixité des attitudes et des visages contraste avec les pelages chatoyants et les bonds désordonnés des loups, venus aider les Cullen dans ce qui est sans doute le plus périlleux de tous les affrontements.

 

Rappelons à cet égard que la pentalogie Twilight n'a pas été filmée par un seul et même réalisateur, mais par quatre cinéastes différents (Catherine Hardwicke, Chris Weitz, David Slade et Bill Condon) ; cela explique en grande partie pourquoi les maquillages changent imperceptiblement au fil des années : Carlisle Cullen par exemple est beaucoup plus « naturel » dans les deux derniers épisodes qu'au tout début. Mais il demeure patent que le code filmique de la représentation du vampire (et de quelques autres créatures 13 qui en partagent des traits métaphoriques) suppose un contraste effrayant entre, par exemple, les yeux rouges, témoins du sang qu'il ingère ou qu'il convoite (Gary Oldmann), et le teint blafard des « princes de la nuit » : songeons aux deux Nosferatu de l'histoire du cinéma, celui de Murnau où s’illustre l'épouvantable Max Schreck, et celui de Werner Herzog qui oppose l'horreur macabre de Klaus Kinski à la grâce diaphane d'Isabelle Adjani. C'est cette grammaire filmique que les réalisateurs les plus contemporains s'efforcent de réactiver dans leur production, par souci de fidélité ressaisie.

 

Il n'est pas anodin que Bella Swan soit immédiatement décrite comme en partie albinos, puis constamment anémiée : « J’étais pâle de nature, et mon évanouissement avait laissé une pellicule de transpiration sur mon visage. » (Fascination 116) ; en effet, la racine latine alba signifie blanc et accompagne la rencontre des deux amoureux comme un intersigne discret du futur destin de la jeune fille ; elle aussi, après sa mort et sa transformation deviendra aussi blanche et froide qu'une porcelaine, mais elle n'en aura plus autant conscience puisque pour elle ce sera devenu une nouvelle norme : « Cela allait de soi. Edward n’était plus glacé, à présent. Du moins, nous l’étions tous les deux. » (Hésitation 399). Les yeux d'Edward autant que sa pâleur témoignent de sa surnature : noirs lorsqu'il est en manque de sang (« Une couleur qui tranchait sur sa pâleur et ses cheveux blond vénitien. », Fascination 58), ils redeviennent dorés une fois sa soif étanchée. Certes, de nombreuses séries jouent sur l'adjonction de prothèses ou de déformations systématiques du visage (Buffy The Vampire Slayer), mais il faut aussi noter que le basculement (non vampirique) de Willow dans les ténèbres de la magie noire se manifeste également par un visage d'une pâleur maladive, sillonné de veines violettes, et dont les yeux deviennent uniformément noirs sans que l'on ne puisse plus distinguer l'iris, la pupille et la sclérotique.

 

Représenter les morts-vivants, une tradition élitiste ?

Contre ma peau soudain brûlante, son corps me sembla glacial comme jamais. Mes doigts se promenèrent sur son torse de neige. Il était tellement beau. (Hésitation 440)

 

Comme le signale Jacques Sirgent dans nombre de ses ouvrages, la blancheur constamment soulignée des vampires marque principalement leur origine aristocratique, puisque dans les sociétés d'ancien régime avoir le teint blanc signifiait essentiellement ne pas avoir à travailler – et donc appartenir aux castes dominantes et dirigeantes ; ainsi par syllepse le vampire est-il considéré comme l'aristocrate des morts, par exemple en opposition au zombie dont la chair altérée et flétrie continue de se décomposer lors même qu'on le ranime 14. La tradition d'écriture romanesque appartient bien entendu à un monde blanc, d’Alekseï Tolstoï à Bram Stoker et à Shéridan Le Fanu ; et l'origine danubo-pontique des légendes vampiriques suppose elle aussi une pâleur phylogénétique puisque liée à la maladie de la porphyrie, qui suscita l'invention de la figure du vampire.

On peut également souligner combien la série The Vampire Diaries sanctifie en quelque sorte l'image de la « belle du sud » incarnée par Nina Dobrev dans un double rôle, et qui est presque aussi blême dans le registre humain que dans l'apparition spectrale – tant la pâleur distinguée reste bien l'apanage de l'upper class...

Il y a de toute façon peu de héros vampires noirs (à l'exception notable de Blade, tout à la fois trilogie de films américains et série 15, et qui met en scène le personnage éponyme de Marvel Comics, créé par Marv Wolfman et Gene Colan en 1973), mais ils ne sont pas de toute façon soumis aux mêmes codes de représentation que leurs frères blancs. Sans doute y a-t-il là un nouveau canon chromatique et pictural à inventer ou tout au moins à proposer... Laurent, « black » indiscutable parmi les buveurs de sang des films, est présenté comme un vampire nomade, membre du clan de James 16. Mais seul le choix de l'acteur spécifie réellement une ethnie 17, avec un look plus jamaïcain qu'africain d'ailleurs ; ses dreads, sa peau cuivrée (« olivâtre » dans le texte) sont aussi relayées par la rubescence soudaine des yeux. Il est en effet interprété par Edi Gathegi, dont l'origine kenyane est en fait oblitérée par le grimage « jamaican turn » que nous évoquons plus haut ; l'exotisme l'emporte donc largement sur l'ethnique.

 

Jardin d’Eden au fruit défendu, le film peut alors s’ouvrir sur l’adolescence brumeuse de l’hostie, promise au double et déchirant amour d’un vampire et d’un loup-garou, sous la blême clarté de la « new moon » ; si l’humain est présent – dans le premier visuel (si l’on peut dire : c’est la pomme qui paraît vivante, et les bras et les mains qui, blafards, ressortissent plus au marbre qu’à la chair) il s’absente presque complètement ensuite ; la fleur blanche du second volume, semblable au duvet du cygne/swan 18, est éclaboussée de rouge… et pend au bout de sa mince tige comme pour accentuer sa flétrissure prochaine ; figure obligée et symbole facile, cette fleur souillée accompagne contextuellement la douleur de Bella, arrachée à ses illusions et à ses rêves, mais véhicule un halo de signifiance qui dépasse la diégèse précise et parle à toutes les sensibilités, à toutes les imaginations, rendant enviable ce qui pourrait ressembler à un memento mori : « Me levant, je contournais la table et m’assis sur ses genoux, me blottissant sans l’étreinte glacée et marmoréenne de ses bras. » (Hésitation 43).

 

Le succès de la saga est lié à cette compossibilité de rencontres et d’adhésion entre des mondes de représentations pourtant très distants. La comparaison avec le troisième visuel est sans doute la plus riche, parce que ramenée à l'essentiel : un ruban rouge, qui serpente jusqu’à nous en montrant un large effilochement, exactement parallèle au « p » de Eclipse, lequel évoque aussi, bien entendu, les crocs acérés du vampire et leur corruscante agressivité… Bras humains et fruit dans le premier visuel, fleur rougie dans le second, simple objet dans le troisième : l’allégorisation de la défloration de l’héroïne se précise, en s’absentant justement de toute prégnance trop charnelle – que ce soit la chair d’un fruit ou le velouté d’une fleur : « Ses doigts étaient glacés, à croire qu’il les avait placés dans une congère juste avant le cours. » (Fascination 57).

L’image raconte aussi, par avance, les deux sacrifices ultérieurs qui attendent Bella : l’accouchement épouvantable, et la mort, inévitable. Ainsi, si les signes s’autonomisent les uns des autres en puisant dans des répertoires différents, ils entrent bien en résonance pour marquer les étapes du calvaire et de l’assomption de la jeune fille : tour à tour tentatrice et tentée, puis agressée et blessée, enfin épouse, mère d’un être qu’elle ne peut mettre au monde qu’en se brisant, et ressuscitée d’entre les morts 19 dans son nouveau monde vampirique. « Non seulement, la littérature tient un discours sur le monde, mais elle gère sa propre présence dans ce monde », rappelait Dominique Maingueneau 20 ; ne pourrait-on voir, dans la construction du vampire néo-victorien, le même souci de singularité et de cohésion ?

Dans ces conditions, peut-on imaginer des « thanatofictions » – récits sur la mort, sur les corps des morts – suffisamment constructives et supportables pour s’adresser quand même à un public young adult et lui apporter une paradoxale leçon de vie – y compris par les exempla les plus loufoques (Forever, True Calling ou IZombie) ?

Toute la production contemporaine centrée sur le corps adolescent monstrueux ou mort-vivant, s’articule en trois mythèmes spécifiques dont seuls deux retiendront réellement l’attention : le/la jeune vampire (qui est un mort se sachant être mort), le/la jeune zombie (sans conscience dans The Strain 21 ou The Walking Dead 22, mais de plus en plus conscient ailleurs, en particulier dans In The Flesh ou Warm Bodies), enfin le métamorphe, généralement loup-garou, qui raconte une tout autre histoire puisqu’indépendante du passage par la mort (comme Jacob Black).

 

Ces innombrables fictions où les corps altérés ou monstrueusement modifiés forment un nouveau baroque, où l’horrifique et l’émouvant s’épousent sans contrainte écrivent une esthétique du « comble », qui s’actualise par exemple dans le choix du jeune fantôme Victor/Louis Levanski 23, comme « icône » du feuilleton Les Revenants ; c’est son regard noir, ses traits figés indéfinissablement inquiétants et sa pâleur déconcertante qui « marquent » le best-seller inspiré par la série 24, et c’est aussi sa silhouette chétive et accusatrice qui, sur les jaquettes des DVD, focalise l’attention en occupant la place centrale, celle à partir de laquelle s’organisent et se hiérarchisent les autres personnages du récit. Quant au passage « courant » du roman au film, il s’inverse ici puisque la série pré-existe à la romance ; ce ré-échelonnement s'inscrit évidemment dans une époque précise et donne à lire des indices, témoins de genres distincts, car le cinéma reste art de la présence et la littérature celui de l'absence. Comme le rappelle Julien Gracq dans Lettrines 2, « l’image ne suggère pas, n’évoque pas : elle est avec une force de présence que le texte écrit n’a jamais, mais une présence exclusive de tout ce qui n’est pas elle 25. » Ajoutons encore que toutes ces images, affiches, couvertures… font l’objet de ce que l'on appelle les midnight release parties, qui ont concerné au premier titre les lecteurs qui ont grandi en même temps que Harry Potter, mais qui se sont maintenant généralisées à d'autres séries, films, DVD ou albums comme les Twilight Midnight Release Parties ou les événements organisés pour la sortie du dernier Star Wars.

 

L’anthropo-thanatologue Louis-Vincent Thomas explique que le déni de la mort prend souvent deux formes : faire comme si la mort n’existait pas… ou bien agir comme si elle n’avait pas d’importance ; ce qui est une tout autre chose 26. En effet, comme tout « grand récit » humain, acté et sédimenté, la confrontation au surnaturel procède à la fois d’une « superstructure » culturelle (ici filmique…) et d’une « infrastructure » sociétale , le chronotope bakhtinien que forme la couverture fantastique se présente donc, par les fictions générées et l’intérêt dû à un phénomène de masse qui ne se dément pas, comme l’une des portes battantes vers l’autre monde ; les intercesseurs, les médiateurs, en assurent à la fois le sacré de cohésion et le sacré de transgression 27, ici marqué par le corps glacé d’un adolescent, en proie à toutes les lividités de la mort alors qu’il devrait manifester l’élan chaleureux et lumineux vers l’avenir. Le mythème vampirique, discrètement présent, ressortit aux deux attitudes, en proposant ce que les mormons appellent le moment de l’exaltation divine.

 

Il semble en effet que la quatrième image projette une figure aux inférences très différentes, dans la mesure où la reine du jeu d’échec, occupant le premier plan, est justement extraite d’une « collection » déjà réalisée : les pièces du jeu ; il s’agit donc d’une citation ; toute blanche, elle l’emporte bien sûr en taille et en éclat sur l’arrière-plan, où se dresse un simple pion peint en rouge ; à partir du moment où le motif de l’échiquier réintroduit une mémoire artistique liée aux anamorphoses des toiles d’Holbein (Les Ambassadeurs, par exemple), il nous pousse à voir ce qu’il n’y a pas : la mort, le crâne, occulté mais non pas totalement évacué, de cet ultime visuel, puisque l’échiquier est comme maculé de sang… comme si la modeste petite figure rouge (Bella dans son état humain ? les méchants vampires finalement vaincus ?) avait au prix d’un terrible déchirement accouché d’elle-même – la reine du jeu redevenue le cygne immaculé que dit son nom, « Swan » - Triomphe, ou pétrification ? En tout cas, dévotion ininterrompue à son blanc sigisbée : « Sa chemise sans manches était déboutonnée, révélant le lissé blanc de sa peau qui s’étalait, ininterrompue de sa gorge aux contours marmoréens de son torse. […] Son contact glacé ne manquait jamais d’accélérer les battements de mon cœur. » (Fascination 278279).

 

Mais euphémisation là encore : ce n’est pas du sang qui teint l’échiquier, mais par simple effet d’optique le reflet du pion rouge. Le féminisme indéniable de la dernière couverture, rachète l’exténuation trop programmée des équivoques, dans cette figure inversée du commencement : le rouge est relégué à l’arrière-plan, et ce qui nous est offert en ostension c’est le blanc, une fois balayées les autres pièces et sacrifiée l’humaine condition. Les caractères choisis pour l’écriture des titres accompagnent le message en créant, par l’allongement ou l’aiguisement des jambages, un motif discrètement menaçant ; on se rappelle les « ff » de Buffy the Vampire slayer tracés comme des poignards, par métonymie avec l’épieu dont se servait la Tueuse pour supprimer les vampires : ici, ce serait plutôt les crocs des prédateurs qui s’actualisent, dialoguant avec la vulnérabilité des objets proposés à notre sagacité.

 

De nombreuses séries fantastiques récentes nous confrontent, en effet, à la survie des jeunes morts – survie spectrale dans Afterlife (pour Alison Mundy), Medium (pour Allison Dubois) et Ghost Whisperer (pour Melinda Gordon), physiologique dans Les Revenants, In the Flesh ou Walking Dead… mais d’autres encore croisent deux ancrages a priori antinomiques : par exemple le récit d’autopsie et la « surnaturelle » vie des morts ; cette hybridation générique retransforme les cadavres en véritables acteurs de l’enquête, puisqu’ils demandent réparation ou, tout simplement, s’en remettent au légiste pour repartir 24 heures en arrière et empêcher ainsi leur meurtre… (Tru Calling : Compte à rebours, créateur Jon Harmon Feldman, Fox, 2003). L’intercession s’accomplit donc sous une ferme centripète : aider à revenir sur terre, à ré-habiter son corps, à renouer le fil de sa vie 28.

 

Cette récente figuralité d’enfants revenants, de jeunes spectres à demi bienveillants, à demi inquiétants, suscite la perplexité de William Marx : « Alors, mort de la littérature ou bien résurrection ? On le sait au moins depuis Œdipe roi : bien des prophéties provoquent leur propre accomplissement. Cassandre, n’est-elle pas l’autre nom de la fiction et de la littérature : celle qui dit le vrai sans qu’on ose y croire ? » (Marx 79). Proche de Bella Swan par la pâleur, le caractère hybride et la destinée incertaine, a surgi Olivia « Liv » Moore, une fille-zombie ravissante mais morte-vivante, qui a trouvé dans un IML matière à se nourrir (elle dévore les cerveaux des morts, acquérant au passage leurs qualités propres). Engagée par le légiste Ravi Chakrabarti, elle se débat sentimentalement entre son ex-fiancé Major, et son alter ego zombie Blaine… Il s’agit donc d’une « zom-com », une comédie zombique plus fantastique/fantaisiste que terrifiante. (IZombie 29), spécialisée dans le « burlesque atroce » (saison 1, épisode 2) – sorte de transposition innocente de Hannibal.

 

On notera le générique BD (très drôle, en partie déjà utilisé dans Desperate Housewives)… En fait, tout est déjà un peu utilisé ailleurs de toute façon, avec des bulles pour retracer les différentes étapes (contagion, réveil) du processus. Il y a même un autre zombie, blond comme l’était le Spike de Buffy, Blaines : David Anders ; la scène augurale est soignée : Liv se réveille en sac mortuaire, super-pâle, et vomit. Le policier qui la voit se sauve, persuadé d’avoir mis une femme vivante dans une housse de morgue ; en fait, oui et non : « But I’am a Zombie ! » est le leitmotiv qui vient scander toutes ses tentatives de retrouver une vie normale. Elle va faire équipe avec Clive Babineaux, détective afro-américain désabusé qui la croit médium : ainsi se trouve activé un trio blanche-indien-noir, bonne image du melting-pot. Se croisent les réminiscences d’autres « grandes » séries, Dollhouse pour les dons soudains, et Tru Calling pour les flashs mémoriels.

 

Vers un « réenchantement sanglant 30 »…

Ce n’était que quand il arrivait à ses poings de se fermer tout à coup – peau encore plus blanche que d’ordinaire, tendue sur les os – que je doutais de l’authenticité de son indifférence. (Fascination, 82)

 

Puisque « ce qui est enfoui finit toujours par refaire surface 31 », la sérialité « bit lit » serait-elle en charge d’une spiritualité désormais opaque ? Selon Jean-Bertrand Pontalis dans Traversée des ombres, « il nous faut croiser bien des revenants […] converser avec bien des morts, donner la parole à bien des muets, […] pour enfin, peut-être trouver une identité qui, si vacillante soit-elle, tienne et nous tienne. » C’est pourquoi la série de Bryan Fuller, Pushing Daisies (2007), tient un discours inédit sur la mort : le héros, Ned, a la faculté de réveiller les morts en les touchant mais aussi celle de les replonger dans le néant en cas de second contact ! Chaque résurrection se prolongeant plus d’une minute entraîne inéluctablement une autre mort : amené à ressusciter son amour de jeunesse, Chuck, il ne peut se résoudre à la perdre de nouveau, lui sacrifiant un innocent. Le journaliste Lucas Armati, critique dans Télérama, résume avec pertinence le caractère exceptionnel de cette série méconnue : « Version fantastique des Experts ? Non, car l’emballage policier s’effrite vite pour livrer un conte kitsch, hyper visuel et attachant sur l’amour impossible de deux êtres qui ne peuvent se toucher sous peine de mort. »

 

En somme, les distinctions aristotéliciennes entre des modes d'énonciation tels que le narratif et le représentatif seraient probablement opérationnelles pour redéfinir le champ de nos thanato-représentations. Des récits en mutation pourraient s'y mouvoir plus librement tout en connaissant les frontières qu'ils franchissent et les territoires qu'ils annexent. Tout se passe comme si le rêve de totalité cher aux Romantiques retrouvait ici une vigueur inattendue : la recherche d'un genre absolu s'accommodant pourtant d'une présentation morcelée et discontinue d'un réel lui-même fragmenté ; aussi, nul n'est surpris de voir, par exemple, la blancheur intrinsèque du mort-vivant constamment associée à son double, le froid perpétuel du tombeau : « Il appuya sa joue glacée contre la courbe de ma gorge. » (Fascination, 298).

 

Il n’en demeure pas moins que, juste un tout petit peu en-deçà du vampire mélancolique, ce qui prévaut aujourd’hui, comme « adynaton » majeur de la représentation déviante du corps adolescent, reste le zombie… Popularisé – comme nous venons de le dire - par la série IZombie, ce rôle connaît une formidable recrudescence, que ce soit dans God bless Zombies websérie française (dir. Paul Germain, MyTF1, 2015), ou dans le roman Zombie Nostalgie du norvégien Stene Øystein 32, qui raconte l’histoire d’un pays insulaire (dissimulé par les autres Etats) nommé Labofnia ; le héros, Johannes van der Linden, essaie de sauver des jeunes gens parqués comme les aliens dans District 9… On renverra pour « supplément d’informations » à l’article de Louise Florès intitulé « Pourquoi on voit des zombies partout ? » ; ludique, très documenté, il incite à tirer, de cet amoncellement hétéroclite mais ciblé, un enseignement à la mesure du phénomène : « Au-delà de son côté exutoire, le monstre nous touche parce qu’il cristallise l’homme devant la mort » ; « Il est la maladie et le temps qui passe, poursuit Thierry Mornet » […]. Une sorte d’incarnation de la maladie d’Alzheimer qu’il ferait bon massacrer, en somme » 33

 

Plus récemment encore, plusieurs opus ont prolongé d’une façon originale et intéressante cette veine zombie ; résolument tourné vers le public adolescent, l’œuvre de Jonathan Levine Warm Bodies (Renaissance) raconte les amours difficiles entre un jeune zombie et une ravissante humaine. De la même veine, une autre réussite, la série britannique In the Flesh (créateur Dominic Mitchell, BBC Three, 2013-2014), décrit le difficile retour à la vie « normale » (?) d’un zombie réhabilité, jeune mort-vivant suicidé quatre ans avant et soucieux malgré tout de reprendre la vie commune avec sa famille ; Kieren Walker porte fond de teint et lentilles de couleur pour ne pas effrayer son entourage, deux fois traumatisé : par sa mort… et par sa résurrection ! Beaucoup plus proche, par la thématique intimiste, des Revenants français que des Walking Dead américains, chaque saison ne comporte que trois épisodes : le succès critique salue d’ores et déjà « un patient et captivant récit sur le pardon et le courage d’exister […] en attendant la suite. » Le même Pierre Langlais souligne toute la cruauté et la possible désespérance de ce sort terrible : « Kieren aura 18 ans pour le restant de sa vie – ou de sa mort. Son entrée dans l’âge adulte est repoussée pour toujours. Sa chair, à l’âge où elle devrait fleurir, est flétrie 34 », pour conclure quelques pages plus loin son analyse : « Une réussite troublante et crue, aux accents sociétaux, un peu comme si Ken Loach s’était aventuré dans le genre horrifique. » Le brutal « rotten » dont le qualifient, dans la version originale, les opposants (« pourri ! ») est à peine atténué par la traduction, puisqu’en français les zombies sont appelés les « putréfiés » : l’incommensurabilité est la même.

Métaphore, analogie, allégorie… les régimes d’images se superposent dans les « visuels » de ces séries, littéraires ou filmiques, et créent un objet indépendant : un objet de consommation, certes, mais un objet qui « pense », un objet pensant (pour reprendre les positions de Gérard Wajcman 35) :

 

Sa peau, blanche en dépit d’une vague rougeur, flamboyait littéralement comme si des millions de minuscules diamants y avaient été incrustés. […] Ses paupières couleur lavande étaient fermées. Il était une statue parfaite travaillé dans un matériau inconnu, lisse comme le marbre et scintillant comme le cristal (Fascination 283),

 

rapporte Bella, plongée dans la contemplation de son séraphique compagnon ; les comparants disent assez la volonté divinisante de l'auteur : « diamants, lavande, statue parfaite, marbre, cristal » ; matériaux nobles et parfum mystique se conjuguent pour transformer Edward en assomption de blancheur, en nouvel Endymion.

 

Dans un registre mineur, la multiplication des adolescents vampires dans les short com (toujours suffisamment glamour pour ne pas susciter l’horreur pure, mais assez inquiétants pour marquer la rupture avec la norme) nous renvoie aussi à la même mode « bit lit », dont la canadienne Ma baby-sitter est un vampire 36 ou la colombienne Chica Vampiro 37 sont de charmants épigones. Ces séries sont surplombées par la puissante ambiguïté qui gouverne notre confrontation au corps mort, au corps du mort, et revêtent une figure archétypique particulièrement riche en enseignement : la fascination épouvantée pour l’objet-cadavre (et son cortège de fictions exorcisantes sur les spectres, zombies, vampires, revenants… qui en sont la textualisation fantasmagorique). Certaines séries cependant acceptent aussi d’engager le spectateur sur la voie de la déception : en effet, ni la foi ni le discours posthumaniste n’éliminent les incertitudes de la responsabilité ou des difficultés relationnelles. Il semble donc en définitive que le transgenre vampirique soit particulièrement en adéquation avec l’esprit de l’époque, et son esthétique disparitionniste. Evoquons brièvement pour clore ce chapitre quelques autres images, appartenant au même canon : les novélisations de Buffy (Paris : éditions M6-Fleuve Noir) mettent en surexposition le visage de Sarah Michelle Gellar ; Vampire Diaries (New York : HarperCollins, « Harper Teen ») commence par le même choix iconique que Twilight (objets cryptés : clé, plume, pomme à demi croquée, bougie, toujours tachées de sang, en trichromie blanc/rouge/noir), puis propose rapidement, au fil des rééditions, des visages jeunes et sexy en couvertures – plus ou moins inspirés des acteurs de la série ; enfin True Blood (en fait The Southern Vampire Mysteries/La Communauté du Sud de Charlaine Harris. New York : Ace Books) refuse toute euphémisation (visage féminin en très gros plan, léchant d’une langue cramoisie du sang qui dégouline à la commissure des lèvres, avec vue sur croc surnuméraire à gauche de la mâchoire 38). Le réenchantement sanglant perçu par Tristan Garcia dans le triomphe de Game of Thrones semble être passé par la dichotomie vampirique du sang et du blanc, de la barbarie des mises à mort et du charme troublant des prédateurs nacrés.

 

Conclusion

En conclusion, il semble bien que la question de la valeur esthétique du genre se pose... comme le signale multiplement Frédéric Martel : « Comme au début de toute révolution, nous ne percevons pas encore les formes du monde futur, pris que nous sommes dans l’effarement face à ce que nous voyons disparaître sous nos yeux, assis au milieu des débris du monde passé, incapables d’imaginer l’avenir. » (Martel 443).

Disons qu'il est indispensable d'étendre la notion d’acceptabilité à des marges autrefois exclues de la critique cinématographique, à condition que ces accompagnements aient pour objectif de mettre en lumière le travail du film proprement dit. En ce qui concerne l'observation des forces et enjeux qui disent le contexte énonciatif des images, leur accueil dans le public et plus largement toutes les relations qui les unissent à la société, la prise en compte des choix d'effets spéciaux ou de maquillage semble légitime et indispensable, pour une acception élargie de la notion d’art, et pour une inscription de ce genre (la « bit-lit ») dans un tissu social (ou paratopie) complexe, nécessaire et problématique, comme l’indique le fanzine Série Culte : « Grâce à ces thèmes universels, la saga Twilight est devenue un œuvre transgénérationnelle qui séduit un très large public. […] Dans l’univers de Meyer, les vampires voient leurs reflets dans le miroir, ils supportent la lumière du jour : elle produit un effet sur eux, mais elle ne les réduit pas en cendres. Ils ne meurent pas quand on leur enfonce un pieu dans le cœur… 39 »

 

Regarder un film, aller au-delà de l’illustration, tapageuse ou absconse, des affiches, nécessite que soit franchi un seuil, et que l’appel du visuel ne soit ni trop singularisant, ni trop universel ; c’est cette transaction que semble bien réussir l’entreprise de monstration contemporaine de la pâleur du jeune blanc non-mort, ou déjà-mort, ou devant mourir… Ornementation de dentelle noire quasi sculptée dans la couverture des livres, larmes de sang au coin des lettres, mise en tensions de tous les poncifs du décor gothique obéissent à la logique de la collection, en ré-assemblant autrement et en classicisant chaque fragment visuel du paradigme « bit-lit » ; l’objet ainsi obtenu peut emblématiser une génération, un sexe, une obsession 40, au-delà ou en-deçà des critères habituels du « bon goût » ou de « l’apport », généralement associé à l’œuvre d’art. C’est sans doute ce dilemme, entre trace et lumière, que réarme et suggère la posture ambivalente des réalisateurs successifs (et des acteurs aussi, d'ailleurs !) : heureux du succès obtenu, mais un peu gênés par le cahier des charges écrasant.

 

Que ce soit dans Blacula 41 ou dans Un vampire à Brooklyn 42, il est vrai que les vampires noirs ne pâlissent ni ne rougissent, la pâleur suggérant à la fois le manque de sang des vampires blancs (Lestat chez Anne Rice), le fait qu'ils ne voient jamais le soleil – et tout simplement qu'ils soient morts. Mais cette lividité renvoie à un état plus social de noblesse "innée" du vampire occidental (le « comte » Dracula, le « prince » Vlad, et autre « comtesse » Bathory...) par un renforcement de la blancheur comme transposition métaphorique du « sang bleu » des aristocrates. Ainsi la néo-fantasy post-victorienne infuse, dans les créations américaines, tout un ensemble de codifications, d'attentes et de traditions réactivées, dont la nuit de noces paroxystique de Bella et d'Edward offre un précipité assez exemplaire :

 

La lumière blafarde de l’astre colorait sa peau d’une blancheur parfaite, à l’instar du sable, de la lune elle-même, et rendait ses chevaux aussi noirs que l’océan. […] j’avançai dans la lumière blanche qui, moi aussi, me dotait d’un teint neigeux. (Révélation 99)

 

On reconnaît là tous les archétypes hérités des « poètes du cimetière », qui furent à l'origine du romantisme anglais, et qui se perpétuent donc à travers ces beaux contes d'amour et de mort.

 

Bibliographie et filmographie

Meyer, Stephenie, Twilight, New York, Little, Brown and Company, 2005. Trad. Luc Rigoureau, Twilight : Fascination, Hachette, 2005

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Meyer, Stephenie, Breaking Dawn, New York, Little, Brown and Company, 2008. Trad. Luc Rigoureau, Twilight : Révélation, Hachette, 2008.

Meyer, Stephenie, The short second life of Bree Tanner, New York, Little, Brown and Company, 2008. Trad. Luc Rigoureau, L’appel du sang, Hachette, 2010.

 

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The Twilight Saga : New Moon (Twilight. Chapitre II : Tentation), dir. Chris Weitz, Summit Entertainment, 2009.

Eclipse (Twilight, chapitre III : Hésitation), dir. David Slade, Summit Entertainment, 2010.

The Twilight Saga : Breaking Dawn (Twilight, chapitre IV : Révélation. Partie 1), dir. Bill Condon, Summit Entertainment, 2011.

The Twilight Saga : Breaking Dawn. Part 2 (Twilight, chapitre IV : Révélation. Partie 2), dir. Bill Condon, Summit Entertainment, 2012.

 

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  1. Barthes, Roland. « Le visage de Garbo ». Mythologies. 1957. Paris : Seuil. 70.
  2. Marie-Noëlle Zeender l'exprime avec force : « Ainsi dès le préambule, Dracula se caractérise par la présence obsédante de la mort. Dans son journal, Jonathan fait la description d’un monde que David Glover qualifie à juste titre de ‘land of ruins and of the dead’, c’est-à-dire une sorte de Sidhe, une représentation symbolique de cette ‘métaphysique de la mort’ si chère aux peuples celtes. » (Zeender 71-72).
  3. Nous citerons les quatre volumes de la saga Twilight de Stephenie Meyer par leurs titres dans l’édition française : Fascination (2005), Tentation (2006), Hésitation (2007), Révélation (2008).
  4. En référence à l’ouvrage de Frédéric Martel, Mainstream. Enquête sur cette culture qui plait à tout le monde (Paris : Flammarion, 2010). Il est clair aussi que les affiches ne « choquent » pas des publics plus sensibles que les Occidentaux, et correspondent ainsi à la fois aux attentes d’une production pour la jeunesse et aux pudeurs de cultures plus réservées.
  5. Cette problématique interpellait déjà Julien Gracq : « La nouveauté, qui ne venait au monde autrefois, et qui même n’était acceptée, que trainant encore collés à elle les débris de la coquille d’œuf cassé semble ne s’imposer aujourd’hui que si […] elle arrive du premier coup à sa forme de cristallisation. » Gracq, Julien. Œuvres complètes. T. 2 : En lisant, en écrivant. Paris : Gallimard, « La Pléiade », 1995. 751.
  6. Jean-Baptiste Greuze, La cruche cassée, 1771 ou 1772, Paris : Musée du Louvre. Une jeune fille, cotillon relevé sur une brassée d’œillets, ne sait quoi faire de ses fleurs une fois cassée la cruche qui devait les accueillir…
  7. La pièce de théâtre Die zerbrochene Krug fut écrite en 1808.
  8. http://www.lecture-academy.com/stephenie-meyer-vous-a-repondu.html.
  9.  La conception originale est due à Gail Doobinin, et la réalisation photographique à Roger Hagadonne, pour Little et Brown.
  10.  On remarque tout de suite la grâce des visages et des corps, leur pose doucement provocante mais finalement hiératique.
  11.  Le métissage n'est pourtant pas absent du casting de Twilight qui juxtapose le teint naturellement pâle de Bella à la carnation de ce qu'il était convenu d'appeler les « peaux rouges » (la famille Black), à la lividité exsanguinée des vampires caucasiens, puis à la peau restée noire de Laurent, le vampire ami de James, sans même parler des vampires mexicains ou indiens.
  12.  Il est à souligner que c'est d'ailleurs une bataille onirique dans la mesure où elle ne se déroule pas vraiment dans ce qu'on peut désigner comme la réalité de la diégèse ; c'est seulement en imagination que les chefs Volturi, pénétrant dans la vision d'Alice, une des Cullen, assistent à cette bataille... qui n'aura donc pas lieu puisqu'au dernier moment ils acceptent l’existence de l'hybride Renesmée.
  13.  On songera à la façon dont la famille Malefoy ainsi que le personnage de Voldemort sont incarnés dans les adaptations de Harry Potter. On se souvient aussi du surgissement expressionniste d'Edward aux mains d'argent, blême et terrifié.
  14. Il y a bien entendu des zombies noirs comme l'atteste la tradition haïtienne du bokor ; que ce soit dans The Walking Dead, dans les films de George Romero ou encore dans la britannique série The Flesh, les zombies appartiennent à toutes les ethnies puisqu'ils sont d'invention (fictionnelle) beaucoup plus récente que les vampires, et ne sont donc pas redevables à une histoire littéraire essentiellement blanche et européenne.
  15.  Blade (Blade : The Series), dir. David S. Goyer (d'après la série de films éponyme, 1998-2004), 12 épisodes, Spike TV, 2006. Blade est incarné par Wesley Snipes.
  16.  Pour l'anecdote : suite à la rencontre de James avec le clan d'Olympic, il est devenu un membre végétarien du clan de Denali, qui comprenait sa compagne Irina, mais il n'a pas tenu compte de leurs lignes directrices alimentaires et a eu recours à la tricherie. Il a été tué par les modificateurs de la Meute Uley, après son agression sur Bella Swan.
  17.  La réalisatrice et l'auteure ont d'ailleurs bataillé à ce propos, car Stephenie Meyer ne souhaitait pas de diversité particulière pour son casting : « Meyer a même tenté d’expliquer à la réalisatrice que les descriptions de ses livres sur la couleur de peau des personnages étaient très précises (et donc qu’ils devaient être blancs). Hardwicke a tout de même réussi à imposer Edi Gathegi, acteur noir, dans le rôle de Laurent. « La seule raison pour laquelle c’est passé, c’est parce qu’elle le décrivait comment ayant une peau couleur olive. Et j’ai dit qu’il existait des olives noires ! Puis elle s’est ouverte à l’idée que les camarades de classe de Bella n’aient pas la même couleur de peau que l’héroïne. » Léger, François. Première, 489 (octobre 2018).
  18.  Anne-Sophie Warmont a attiré notre attention sur le fait que l’héroïne de Pirates des Caraïbes s’appelle aussi Swann (Elizabeth…) et qu’elle attendra son époux, le Hollandais volant, tout au long de sa vie terrestre… Lui est devenu immortel, mais pas elle ; la fin du cycle (en tout cas actuelle) leur permet cependant, grâce à l'ingéniosité du fils, de se retrouver ! Le mythe y perd, mais le fell good movie y gagne.
  19. Isabella Marie Swan nait le 13 septembre 1987 et s’éteint le 10 septembre 2006, à l’âge de 19 ans. Edward Masen-Cullen, son époux, est né en 1901 et est mort de la grippe espagnole en 1918. Il a donc 17 ans pour l’éternité.
  20. Il ajoute « l'appartenance au champ littéraire serait une difficile négociation entre le lieu et le non-lieu, une localisation parasitaire, qui vit de l'impossibilité même de se stabiliser. Cette localisation particulière, nous la nommerons ‘paratopie’ ; là encore se dessinent des similitudes avec le ‘lieu’ assigné à la bit-lit, sous-genre d’un sous-genre, émergeant pourtant et suscitant gloses et ré-articulations légitimantes. » Maingueneau, Dominique. Le Contexte de l'œuvre littéraire. Paris : Dunod, 1993. 20.
  21. The Strain, dir. Guillermo del Toro, FX, 2014-2017. Décapitée dans l’épisode 4 de la saison 1, l’enfant monstrueuse est en fait habitée par un parasite anthropophage qui l’a transformée en simple incubateur. Elle n’est donc plus « elle-même » quand Abraham Setrakian, le chasseur de vampire, l’exécute pour l’empêcher de nuire.
  22.  … ou son prequel Fear of the Walking Dead.
  23.  Le jeune interprète, Swann Nambotin, a acquis une renommée foudroyante et immédiate, reléguant dans l’ombre quasiment l’ensemble du casting.
  24.  Patrick, Seth, The Returned. 2014. Trad. Sébastien Baert. Les Revenants. Paris : éditions Michel Lafon, 2015.
  25. Gracq, Julien, Œuvres complètes. T. 2 : Lettrines 2. Paris : Gallimard, « La Pléiade », 1995. 299.
  26.  Thomas, Louis-Vincent. La mort en question : traces de morts, mort des traces. Paris : L’Harmattan, 1991.
  27.  Ainsi que le distribue Roger Caillois dans L’Homme et le sacré (1ère éd. 1939).
  28.  La série britannique The Fades (dir. Jack Thorne, BBC Three, 2011) véhicule un autre message : les morts invisibles nous environnent, et il faut les empêcher de ressusciter pour anéantir les vivants ; heureusement, un « élu », Paul, les voit et lutte contre le plus maléfique d’entre eux.
  29.  IZombie (d'après la série du comic book éponyme de Chris Roberson et Mike Allred), dir. Rob Thomas (auteur de Veronica Mars) et Diane Ruggiero-Wright, The CW Television Network, 2015-2019.
  30.  C'est à Tristan Garcia que nous empruntons cette formule. « Sous le regard des dragons », Philosophie Magazine, HS 41, Game of Thrones, 2019 : 63.
  31.  Morice, Jacques. Télérama, 3313 (10 juillet 2013) : 110.
  32. Øystein, Stene, Zombie Nostalgie. Arles : Acte Sud, 2015.
  33.  Florès, Louise. « Pourquoi on voit des zombies partout ? ». Marie-France (janvier 2013) : 70.
  34.  Langlais, Pierre. « Moi, zombie, 18 ans, mal dans ma peau ». Télérama, 3336-7 (18 décembre 2013) : 186.
  35.  Wajcman, Gérard. Les experts, la police des morts. Paris : PUF, 2012.
  36.  Ma baby-sitter est un vampire, création Bruce McDonald, Télétoon, 2011-2012, d’après le téléfilm éponyme, My Babbysitter’s a Vampire, dir. Bruce McDonald, Fresh TV, 2010. La série narre les aventures de Sarah, entourée de ses amis Ethan, Benny, Erica et Roy.
  37.  La telenovela Chica Vampiro (création Marcela Citterio, RCN Television, 2013) raconte les amours et les catastrophes de Daisy, jeune vampire dont l’amoureux humain, Max, ignore tout de sa condition.
  38.  Harris, Charlaine. Dead until Dark. 2001. Trad. Cécile Legrand-Ferronnière. La Communauté du Sud. 1 : Quand le danger rôde. Paris : J’ai lu, 2009.
  39.  Série Culte, HS 62, La saga Twilight continue…, juin-juillet 2010 : 11-12.
  40.  Il y eut, autour de Robert Pattinson, des phénomènes de « Robsessed » (littéralement : obsédé par Bob) assez étonnants !
  41.  Blacula, le vampire noir, dir. William Crain, prod. Samuel Z. Arkoff, 1972. Le film reprend le thème de Dracula (avec William Marshall dans le rôle-titre) en l'adaptant à la blaxploitation ; il a donné lieu à une suite, Scream Blacula Scream (1973).
  42.  Vampire in Brooklyn (Un vampire à Brooklyn), dir. Wes Craven, Paramount Pictures, 1995. Avec Eddy Murphy.